Au péril de l'amour

Lady Millie se mit rapidement à pousser des hauts cris chaque fois qu’il partait, puis à lui faire une scène à chaque retour.

Cette attitude irritait le duc de plus en plus.

A peine l’année de deuil qu’elle avait dû respecter fut-elle terminée, que lady Millie décida, sans l’avoir consulté, de partir rejoindre le duc dans sa villa de Monte-Carlo où il séjournait mais où il ne l’avait pas expressément invitée.

Le duc était parti, cette année-là comme les précédentes, se reposer dans sa splendide villa blanche que son père avait fait bâtir au sommet de la colline qui domine Monaco, au milieu du plus fantastique des jardins exotiques de la Côte.

Cette maison immense aurait aisément pu accueillir une cinquantaine d’invités. Cette année-là, elle était presque vide, le duc n’ayant pas immédiatement convié ses amis, car il souhaitait se reposer tranquillement pendant quelques semaines après un hiver exténuant.

Cette fatigue n’était pas seulement due à une intense activité sportive. La situation politique en était l’autre cause. Beaucoup de ses amis ignoraient cet aspect de sa personnalité, mais le duc avait un rôle influent à la Chambre des Lords et tenait à remplir avec la plus haute conscience les devoirs de sa charge.

Cependant, lady Millie était arrivée impromptu, en déclarant avec légèreté :

— Comme nous allons nous amuser, ensemble, ici ! (Puis elle avait ajouté, sans lui demander son avis, d’un ton ferme et décidé :) Nous ne pouvions pas continuer à jouer à cache-cache, comme nous l’avons fait jusqu’ici, mon pauvre ami ! C’est ridicule ! D’ailleurs, dans un mois, je pourrai quitter mes gants noirs, et vous vous rendrez compte que je suis vraiment une femme libre.

Il était impossible de ne pas comprendre ce qu’elle voulait dire par là. Et le regard qu’elle adressa au duc l’invitait ouvertement à se déclarer.

A la grande déception de la jeune femme, le duc n’avait rien répondu ; les mots tant attendus n’étaient pas venus.

Certes, tout au fond de lui-même, il sentait bien qu’un jour viendrait où il devrait probablement se résoudre à épouser lady Millie ; mais une mystérieuse intuition l’avait toujours empêché de prononcer les paroles fatales.