Commentaires de livres faits par MilaMaelle
Extraits de livres par MilaMaelle
Commentaires de livres appréciés par MilaMaelle
Extraits de livres appréciés par MilaMaelle
Le frère de Casper passait assez souvent, environ une fois toutes les six ou sept semaines. Systématiquement, il réglait plusieurs mois à l’avance l’hébergement de son cadet, et se faisait un point d’honneur à demander à la personne chargée de l’accueil si quelqu’un avait embêté Casper depuis sa dernière visite. Tous les réceptionnistes étaient bien trop terrorisés à l’idée de lui mentir : ils s’empressaient de tout raconter et balançaient les noms de ceux qui avaient piqué les crayons de couleur de Casper, lui avaient envoyé un coup de pied au tibia, ou avaient simplement changé de chaîne alors qu’il regardait Rue Sésame. Les coupables payaient tous pour leurs actes, et aucun ne s’avisait de les réitérer, ce qui garantissait à Casper une existence généralement très agréable au sein de l’hôpital du docteur Moland. Mais il ne remettrait sans doute désormais plus jamais les pieds dans l’établissement, et, par conséquent, Devon Hart non plus.
- Non, pas vraiment.
Tran ne sembla pas l'entendre.
- Je me disais qu'il n'avait pas toujours été comme ça, que c'était la maladie qui l'avait changé. Mais c'est faux. Luke a toujours été dingue. Il y a toujours eu de la violence en lui. C'est un brillant écrivain, un brillant causeur. Il a le chic pour te faire croire que tout va bien. Mais même avant d'être séropo, il en avait tous les jours après le monde entier. Il m'a dit que ce qui pourrait lui arriver de mieux, ce serait de se réveiller un beau jour et de ne pas être en rage, rien qu'un jour. Mais il en était incapable.
- Tu affirmes n'être pas croyant, tu penses donc diriger ta vie avec ton seul libre arbitre ? me demande-t-elle à brûle-pourpoint.
- Je crois que le libre arbitre des hommes consiste à choisir la femme qui décidera de leur vie à leur place.
Éparpillée au fil du temps
En quelques notes insensées :
Et meurent nos amours blessés.
- Votre vie, c'est du vent.
- Quoi ? Qu'est-ce que vous dites ?
Elle attendit quelques secondes. Les bolides avaient déjà disparu dans la direction de Glasgow.
- Je dis : vous prendrez le suivant.
Il s'agissait pourtant d'un hémicycle traditionnel, avec des rangées de banquettes vides ; en bas, sur une estrade, on reconnaissait la non moins classique table de conférence, l'alignement des carafes d'eau, des microphones et des cartons tournés vers un public imaginaire, portant nos huit noms imprimés en italiques.
Mais derrière cette table, les huit fauteuils étaient tous surmontés d'un casque semblable à celui que Némos avait utilisé le matin pour ma Visite, et tous séparés les uns des autres par des cloisons. Sur le mur derrière la table, et donc invisible depuis les fauteuils, se trouvait un écran géant. Télek, d'une boutade, résuma l'impression générale :
- Un salon de coiffure pour asociaux !
Un mot scandaleux : affection. Comme si l'amour que je portais à maman était insuffisant. Comme si la maladie l'aimait plus fort que moi.
Laissez-moi réfléchir, enchaînai-je. En toute logique, Tolstoï devrait se trouver dans la section LITTÉRATURE RUSSE, dans le couloir du second étage, près de la salle de bain. Mais si vous me posez la question c'est qu'il doit y avoir un piège... Peut-être est-il rangé parmi les écrivains ayant souffert d'une maladie chronique ? J'ai cru voir qu'il existait une classification caractéristique pour cette catégorie. Dostoïevski par exemple se trouve en compagnie de Flaubert, Molière dans la section EPILEPSIE... Tolstoï quant à lui souffrait de migraine, de syphilis et mourut d'une pneumonie. Cela devrait suffire pour le retrouver quelque part dans une de ces sous-catégories... Cela dit, la syphilis n'est pas tenue en compte dans votre classement : trop d'écrivains en ont été victimes. Quant à la pneumonie, c'est seulement en fin de vie qu'il l'a contractée, elle ne correspond pas au classement. Je le verrais donc plutôt dans la section CÉPHALÉES. Quoique... Tolstoï réussit à surmonter ses migraines en adoptant un régime végétarien. Il appartient donc à l'exception 5.1 de la catégorie ÉCRIVAINS MALADES et doit donc doit donc figurer parmi les AUTEURS AYANT DÉVELOPPÉ UNE PHILOSOPHIE DE VIE EN ACCORD AVEC LEURS PROBLÈMES DE SANTE. Conclusion : il se trouve dans la cuisine, à droite de la hotte, deuxième étagère. Mais... Mais ? souligna le vieillard fort intéressé. Mais je me trompe ! repris-je. Je me souviens à présent du concept de pacifisme végétarien que Tolstoï développa à la fin du XIXe... Ce pacifisme singulier est antérieur à sa décision de régime alimentaire et doit correspondre à l'exception 5.1.6, il devrait par conséquent se trouver rangé avec les AUTEURS AYANT ÉTÉ INSPIRATEURS D'UN SYSTÈME DE PENSÉE PACIFIQUE. Tolstoï est à coup sûr à deux pas d'ici, dans ce petit salon, derrière moi, à gauche de la porte sur la troisième étagère, à côté de Mes expériences avec la vérité de Gandhi.
Intrigué par un tel classement, je me rendis à la page de la règle n°34. J'y découvris que tous les écrivains morts brutalement avaient droit à une place à part : chambre de Bertrand, étagères près de la fenêtre, gauche. Les morts violentes se séparaient en cinq catégories : SUICIDE, ACCIDENT, DUEL, MEURTRE, GUERRE. Les suicides à eux seuls se divisaient également en une douzaine de sous-catégories : ARMES A FEU (Montherlant, Gary, Hemingway...), PENDAISON (Nerval, Tsvetaeva, Duprey...), NOYADE (Woolf, Celan...). D'autres types de mort ne comportaient qu'un seul représentant : PRÉCIPITÉ DANS LE CRATÈRE DE L'ETNA (Empédocle), HARA-KIRI (Mishima), ÉCRASÉ PAR UN ARBRE (Von Horvath), ASSOME PAR UNE TORTUE TOMBÉE DU CIEL (Eschyle). Dans la catégorie ACCIDENTS, la section AUTOMOBILE répondait à une amusante logique de classement selon le nombre de cylindres du véhicule : Huit cylindres (Facel Vega FV3 pour Albert Camus), Six cylindres (Aston Martin DB4 pour Roger Nimier, Jaguar MK2 pour Jean Bruce). Dans la catégorie GUERRE, le classement faisait la distinction entre les victimes (Saint-Exupéry, Robert Desnos, Max Jacob) et les collaborationnistes (Brasillach, Pierre Drieu La Rochelle), les uns et les autres étant rangés dans des pièces éloignées. Une histoire d'inimitié, très certainement.
deux coïncidences, ce n'est qu'une coïncidence ;
trois coïncidences, c'est le début des emmerdes.