Pour sa survie, Tome 1

Tek se rappelait aussi la façon dont lui avait parlé l’homme juste après qu’il se fut réveillé. Comme à un esclave. Il releva la tête alors qu’il arrivait à la fin du rang formé par tous les gens qui étaient là. Un hélicoptère, dont l’hélice tournait et le moteur vrombissait, était posé quelques mètres devant lui. On aurait dit que les personnes qui constituaient la file évacuaient cet endroit, ou y étaient forcés :

ces mêmes soldats en armure noire les pressaient de monter dans l’hélicoptère.

Puis un autre arrivait et se remplissait de gens à son tour.

TEK - « Je ne me souviens plus de rien… c’est bizarre. Un gros trou à la place de ma mémoire. Ce que m’a dit ce type, Luc, est plus qu’étrange. J’ai l’impression de naître aujourd’hui, dans une situation très mauvaise, sans rien avoir décidé. Je m’appelle Tek… à part ça, c’est le vide. Si, je sais qu’on est en

2089. Mais je ne connais même plus l’année de ma naissance. La plupart des autres gens ont l’air aussi perdus que moi. Des hommes, des femmes… certains semblent avoir à peine la majorité, tandis que d’autres ont dû connaître la retraite il y a déjà longtemps. Je dois monter dans un hélicoptère, maintenant. Je vais en profiter pour poser d’autres questions à Luc, parce que je ne peux pas rester comme ça… »

Deux soldats en armure noire le firent grimper dans un hélicoptère. Tek ne pensait pas en avoir déjà pris un, et cette idée l’angoissait. Après que quelques autres personnes furent montées dans l’hélicoptère, les portes se fermèrent, et celui-ci décolla.

Tek décida de ne pas regarder dehors. La présence de Luc, assis à côté de lui, le rassura. Il en profita pour lui poser quelques questions, afin de comprendre un peu plus :

— Tout à l’heure, tu m’as parlé d’expériences, qu’est-ce que tu voulais dire exactement ?

L’autre le dévisagea, regarda le pilote devant, avant de soupirer et de se lancer :

— Eh bien, à vrai dire, on ne sait pas ce qu’il se passe exactement lors de ces expériences. Tout ce qu’on sait, c’est que, quand quelqu’un est appelé pour l’un de ces tests, il n’en revient plus jamais…

Il avait une mine renfrognée.

— Et comment ça se fait que tu sois encore ici ?

Tek essayait mais ne se souvenait vraiment plus de rien.

— Oh ! Moi, j’ai la chance d’être parmi ceux qui n’ont pas encore été

appelés, mais mon tour viendra et…

Il ne finit pas sa phrase.

Tek sentait que quelque chose clochait.

— Attends, tu es en train de me dire que l’on fait des expériences sur les hommes ?

— En fait, ce laboratoire sacrifie des gens pour essayer de trouver un antidote à une maladie. C’est un virus qui attaque les poumons, qui est dû à la pollution. C’est une maladie si fréquente et dévastatrice aujourd’hui… qu’on estime que pour trouver l’antidote, on doit procéder à des expériences sur des cobayes humains.

Tek se demanda alors qui pouvait bien faire des expériences potentiellement mortelles sur les hommes.

— Donc un laboratoire organise ces expériences. Sais-tu qui s’en occupe personnellement ? Qui sont les gens qui y travaillent ?

— Tout ce que je vais te raconter, tu peux être sûr que c’est vrai. Je l’ai vécu.

En 2075, afin de réagir à la maladie des poumons qui a gravement touché

l’humanité, les gouvernements ont créé l’Institut Intergouvernemental de

Recherche Epidémiologique dans l’objectif de sauver l’humanité. Pour cela, l’Institut doit trouver un antidote. Sauf que, pour trouver un antidote, il allait falloir en « payer le prix » en termes d’expérience in vivo sur les êtres humains et sans la phase habituelle d’expérience sur les animaux. Au début, compte tenu de la gravité de la maladie, les peuples ont accepté cette initiative peu orthodoxe.

Mais avec le temps, les expériences se sont multipliées et le système a dégénéré :

pour trouver des cobayes humains, l’Institut a organisé des trafics d’organes et d’êtres humains. Puis, des journalistes ont réussi à s’infiltrer dans les laboratoires secrets et ce qu’ils ont dénoncé faisait froid dans le dos : les expériences menées sur les humains s’inspiraient de la fameuse Unité 731.

— Je ne connais pas, quelle est cette unité ?