Tuan Mac Cairill

Tuan Mac Cairill avait été blessé par balle lors des troubles qui suivirent le retrait des troupes britanniques d'Ulster.

Il repose dans le cimetière de Milltown à Belfast.

Il a été le dernier mort de cette saloperie de guerre.

Il a été la dernière bouchée, celle qui a rassasié le monstre dévorant.

Pourtant c'est un vieil homme, venu boire sur sa tombe, qui devrait être dans le trou à sa place.

Ses pauvres yeux, déjà, sont morts d'en avoir trop vu :

Il était, en 1169, aux côtés de Rory O'Connor quand ce traître de Dermot Mac Murrough appela les normands à son aide...

Il fut à Dundalk avec Edouard Bruce dont son peuple avait fait un roi...

Il a vu Cromwell et ses prétendus saints aux cotes de fer assassiner, violer, piller pour la plus grande gloire de l'église d'Angleterre...

Ces douze premières planches de l'album, "histoire de Tuan Mac Cairill", sont signées par Alain Deschamps pour le scénario et par Claude Auclair pour les dessins.

Elles sont une très belle et très poignante évocation du combat de l'Irlande, à travers les siècles, pour sa liberté.

Quelques pages rédactionnelles éclairent ensuite l'actualité de ce conflit.

Claude Auclair rend hommage à Jacques Acar et livre les secrets de "Catriona Mackilligan", une histoire dont on ne connaîtra jamais le dénouement mais dont il nous offre les trois seuls épisodes.

Les deux premiers, "l'homme de Londres" et "le défi" furent publiés, le troisième, "la chasse au trésor", ne le fut pas car le journal "Record" changeait de formule.

Il y est question de quelques "fous" d'écossais, épris de liberté, qui ont mis tous leurs espoirs dans le fils de Jacques III, Charles Edouard et de Catriona Mackilligan, une farouche jeune fille, pleine de courage et de détermination...

Paru, en 1982, aux "Humanoïdes associés", ce superbe album est une réussite.

Son propos est engagé, clair et déterminé.

Ayant été publié quelques mois après le tragique épilogue de la grève de la faim de Bobby Sands et de ses compagnons, son propos, tristement d'actualité, se voulait être aussi un cri de liberté.

Il rend un bel hommage à ces deux peuples celtiques écrasés sous la botte du géant britannique que sont l'Irlande et l’Écosse.

Il est réalisé en noir et blanc.

Si l'ensemble est remarquable, le dessin du premier récit, de "l'histoire de Tuan Mac Cairill", est particulièrement soigné.

Et son scénario particulièrement bien écrit.

Cette première histoire a ma préférence dans l'oeuvre d'Auclair qui est pourtant riche d'autres trésors...