Vorrh, Tome 3 : Les Divis

Troisième et dernier volume de la série Vorrh, ce livre est dans la lignée des deux premiers tomes, bien que j'aie trouvé sa lecture un peu moins énigmatique que celle des précédents, peut-être parce que le décor est enfin planté et que l'on connaît à peu près tous les personnages. Leurs arcs narratifs se clôturent en effet – pour la plupart mais pas toustes (Spoiler(cliquez pour révéler)on ne connaîtra pas le sort de l'Exsidrus) – et le livre apporte une résolution à l'intrigue globale de la Vorrh, avec au passage quelques révélations (Spoiler(cliquez pour révéler)ma préférée étant l'existence de la connexion entre le puits de la maison rue Kühler Brunnen et le cœur de la Vorrh), même si bien des mystères subsistent. Si une partie des pièces du puzzle trouvent leur place, de nombreux trous demeurent qu'il nous faudra compléter par nous-mêmes.

Je reste mitigée quant à cette trilogie, à la fois envoûtante dans sa complexité organique imbibée d'ésotérisme et de religion, et trop érudite et ésotérique pour ne pas laisser la plupart des lecteurices sur le carreau. Sa lecture m'a fait le même effet que les œuvres de Lynch : une sensation irritante d'être trop bête pour comprendre, mêlée à une fascination qui donne envie de continuer.

Cependant, il me semble que le style apparemment ampoulé de la trilogie « Vorrh », si agaçant par moments, s'explique par la profession de Catling, qui était poète et artiste, et que la condescendance se trouverait plutôt du côté de ses adorateurs, tel Alan Moore avec sa préface dithyrambique dans laquelle il tape sur le genre de la fantasy qui comporterait, selon lui, trop de mauvais·es auteurices.

Quoi qu'il en soit, et même si c'est enfoncer une porte ouverte que de comparer la lecture de « Vorrh » à une expédition dans cette fameuse forêt, la seule façon d'apprécier cet ouvrage ambitieux semble être d'accepter de ne pas tout comprendre et de se laisser imprégner par son atmosphère si particulière, tout en violence et en transformations perpétuelles. C'est ainsi que l'on pourra le mieux savourer les réflexions et sensations uniques que cette fiction exigeante a à offrir.

La Vorrh évoque d'ailleurs irrésistiblement sa grande sœur : la « Forêt des Mythagos » de Robert Holdstock, dont l'œuvre demande la même approche.

Je me suis questionnée sur l'aspect fétichisant de cette série, que ce soit l'appropriation culturelle de personnages et modes de vie africains ou les rapports violents entre les hommes et les femmes. Catling évolue sur le fil du racisme et du sexisme, cependant après avoir lu la trilogie dans son intégralité, il me semble qu'il en ressort une dénonciation explicite du racisme et que les personnages féminins sont traités avec ni plus ni moins de respect que leurs homologues masculins.

Je salue en tout cas le travail de traduction qui n'a pas dû être évident étant donné l'écriture riche et poétique de Brian Catling, et ses néologismes. Cette prose magnifique a été mon plus grand plaisir pendant cette lecture.