Les Batailles de l'Astartes, Tome 16 : Monde-machine

La bête ouvrit sa large gueule et son haleine putride submergea le Catachan devant lui. D’épais filets de bave s’étirèrent entre ses deux mâchoires, les restes d’un précédent repas étaient encore visibles entre des dents aussi grosses que le poing d’un homme. Le saurien observa le soldat devant lui, puis il avança la bouche pour se nourrir. Ses mâchoires se refermèrent sur le bouquet de verdure offert et, avec un grognement de satisfaction, il engloutit l’offrande. Le Catachan flatta l’énorme crâne, mais avant qu’il n’ait pu faire de même avec les cinq autres arbosaures qui servaient de montures à son escouade, la voix de son supérieur le rappela à l’ordre.

— Fous-leur la paix, Mack. Si tu les nourris maintenant, ils n’avanceront plus, et je préférerais arriver à la base avant la nuit. »

Il n’y eut aucune malice dans la voix de Piet Brigstone, seulement l’autorité brute d’un homme habitué à commander.

— Et ramène-toi par ici. Je voudrais que tu jettes un œil sur ça. »

Mack se débarrassa du bouquet qu’il avait ramassé et fit ce qui lui était demandé. Son chef était agenouillé et examinait une profonde marque dans le sol boueux de la jungle. Quatre autres silhouettes tout aussi bien charpentées regardaient elles aussi.

— C’est quoi, chef ? » demanda Mack en rejoignant son supérieur.

Chacun des membres de l’escouade le comprenait parfaitement, malgré sa manière saccadée de parler, comme s’il s’exprimait avec difficulté.

— C’est une piste. Le premier signe évident que nous ayons pu trouver. Tu peux l’identifier ? »

Le doigt du chef suivit les contours de cette profonde empreinte longue d’un bon demi-mètre. Mack fit une grimace et étudia la trace avec attention. Très peu de Catachans revendiquaient un niveau d’intelligence qui leur aurait valu une place de choix au sein d’un Administratum ou du Departemento Munitorum, mais le développement intellectuel de Mack était notoirement limité. Cela n’importait pas pour Brigstone ou le reste de la troupe, et ce qui lui faisait défaut dans ce domaine, il le compensait largement dans d’autres. Non seulement il portait le bolter lourd de l’escouade, mais durant leurs trois années de présence sur Pythos, il s’était montré capable d’identifier la moindre espèce locale d’après une simple empreinte, déjection ou trace de morsure.

— Ça r’ssemb’ à un carovis, chef. Et un gros, » répondit Mack après quelques instants de réflexion.

— Tu es sûr ? » insista Brigstone.

Les carovis n’étaient pas les plus gros prédateurs à hanter les jungles de Pythos, et préféraient généralement des terrains de chasse plus giboyeux comme les Marais de la Mort ou les savanes ouvertes. Qu’un individu s’aventure aussi près de zones peuplées était rare, mais si Mack avait raison, ce serait le troisième en une seule semaine à s’approcher à moins de vingt kilomètres d’Atika.