Prisonnière d'un corps qui ne sera pas le mien

PRISONNIÈRE D’UN CORPS QUI NE SERA PAS LE MIEN

Natacha Jambon

Prisonnière d’un corps qui ne sera pas le mien

L’enfant procréé par amour ou par inattention

Premier trimestre

Déjà parents de quatre enfants, trois garçons et une fille, il a connu sa femme par un ami de chantier qui était le frère de sa future femme. Puis, à force de se côtoyer, et de mettre les parents en relation avec l’ami et la future petite amie. La rencontre eut lieu en Italie où ils ont flirté ensemble durant tout un été. Puis fut venu le jour du mariage. Et ont fondé un foyer, avec des enfants. Originaire de la Meurthe-et-Moselle, là où frères et sœur ainsi que même les parents résidaient. Un couple dont lui travaillait dans les travaux publics, elle était couturière de métier, devenue femme au foyer à s’occuper des enfants et à entretenir le logement et tout ce que comporte l’entretien. Plusieurs déménagements ont eu lieu à parcourir la France. Puis vint un moment de détente où le couple a une petite envie de se rapprocher.

Deux êtres nus sur un lit s’entrelacent, se caressent, s’embrassent ; un échange préliminaire, puis vient l’envie de la pénétration. Des gémissements de part et d’autre, le pénis, d’un échauffement dans le vagin s’échappe un jet de semence qui permet à environ quarante millions de spermatozoïdes de parcourir un point précis en un temps chrono de soixante-douze heures ; donner la vie depuis l’intérieur à l’infiniment microscopique n’est pas si facile. Il faut que le couple faisant l’amour dans sa chambre soit en bonne santé pour que cela réussisse.

Apparemment, cela a fonctionné, car le spermatozoïde de l’être masculin (mon père), doté d’une tête et d’un flagelle a rencontré un ovule de l’être féminin (ma mère). Donc je suis la création de cette rencontre sexuelle.

Et tous deux, spermatozoïde et ovule, vont tenter de survivre et tracer leur voie. Le commencement de la création de l’être qui va grandir.

Au cours de mes premiers jours de vie, la route est toutefois longue et sinueuse pour parvenir jusqu’aux trompes où aura lieu cette fécondation. À ce moment-là, je commence tout doucement à me laisser glisser de la paroi de la trompe vers l’utérus.

Je suis encore tout petit, pendant que cet espace dans laquelle continue à me transporter en me donnant la vie.

Il m’aura fallu trois semaines pour faire mon sexe, la couleur de mes yeux, la pigmentation de ma peau, et je ne suis pas plus grand qu’une tête d’épingle.

À partir de cet instant-là dans le monde des humains, la maman est en train de s’interroger sur moi.

Vient le moment où il faut aller à la pharmacie acheter un test de grossesse, elle le fera dans la salle de bain, attendant que le jet d’urine révèle un résultat, positif.

Elle l’annoncera à un moment précis de la journée :

« Chéri, je suis enceinte. »

Jusque-là, le couple doit être heureux de cette bonne nouvelle. Ou c’est un déchirement si je ne suis pas prévu au programme.

Quant à moi, je vais me positionner sur la muqueuse. Après quatre semaines, je mesure 1,5 millimètre.

Un départ du cordon ombilical se forme et s’allonge et puis s’ approchera et s’accrochera à moi. Son rôle est de m’aider à m’oxygéner et à m’alimenter en nutriments.

Au fil des semaines, mon corps évolue, on le reconnaît de moins en moins depuis son point de départ. À ce stade je mesure 14 millimètres.

La maman échange avec des amis, avec la famille, son mari, de sa grossesse de comment je vais…

Vient le moment de la toute première échographie.

La maman a pris rendez-vous chez le médecin qui la suit pour son enfant. Le jour J arrive, elle discute avec le docteur qui l’invite à s’allonger sur la table d’auscultation, puis il lui montre les différentes parties.

« Votre enfant à ce stade de la grossesse mesure 6 centimètres et pèse 14 grammes. Vous pouvez annoncer la bonne nouvelle que pour le moment tout va bien. »

Depuis l’intérieur : Je grandis chaque jour.

La maman quitte la table d’auscultation, le docteur la rassure et l’invite à une nouvelle consultation pour la prochaine échographie ; à vingt-deux semaines, il faudra revenir.

Elle rapportera la bonne nouvelle, à son mari, ses amis et à la famille.

Moi de mon côté, je suce mon pouce, ça m’occupe un peu.

Pendant ce temps, la maman, le mari et leurs quatre enfants vivent en harmonie dans leur petite maison de village de Cadenet.

Le mari qui aime bien discuter avec tout le monde, de par son job aux travaux publics et puis à force, il se fait ami avec l’un d’eux. Il est propriétaire de quelques terres agricoles. Les enfants déjà conçus et assez grands profiteront des arbres fruitiers de cet ami.

La maman, une belle Italienne, avec ses quatre enfants et son mari feront des photos sur la place du village en souvenir pour les mettre dans l’album.

maman me donne La vie

Second trimestre

À partir de maintenant la période de croissance s’accélère, tout est en place, mes organes commencent à remplir leur rôle. Je peux ressentir les bons petits plats qu’elle aime faire, mes cellules gustatives sont en place. Je grandis de plus en plus, mon espace intérieur commence à prendre aussi de plus en plus de place. Je prends de plus en plus de force et mes gestes internes peuvent être ressentis lorsque je tourne ma tête ou mes membres. Je mesure à stade de ma vie 12 centimètres.

Je ressens les bruits qui sont à l’extérieur de plus en plus fort. Je commence à me tourner dans l’utérus, car les bruits que je perçois depuis l’extérieur m’incommodent.

Depuis l’extérieur : La maman est assise sur le canapé, et le mari qui donne de grands coups de marteau contre le mur. Car il commence à préparer la chambre du nouveau bébé qui va pointer son nez dans les prochains mois.

La maman ressent que dans son ventre je bouge, elle y mettra ses deux mains dessus pour faire qu’un avec moi-même. Vu que je suis la chair de sa chair et de son propre sang, il est tout à fait normal qu’elle veuille prendre contact.

Au rendez-vous de la seconde échographie, le mari l’ accompagne ; les enfants sont à l’école, une voisine se chargera de les récupérer.

Arrivés sur place, ils rencontreront l’obstétricien qui s’occupe de la grossesse. Elle s’allongera à nouveau sur la table d’auscultation.

– Comme vous pouvez le voir, votre bébé se porte à merveille. Souhaitez-vous connaître déjà le sexe de votre enfant ? – Oui, nous voulons bien le connaître s’il vous plaît ! – Eh bien, je vous le montre sur l’écran, regardez ici même, vous avez son sexe, c’est un garçon ! Votre enfant mesure aux environs de 16 centimètres.

Depuis l’intérieur :

Je commence à percevoir les bruits, mais je ne sais pas à quoi ils correspondent. J’ai mes cinq sens qui se développent.

Depuis l’extérieur : – Au revoir, Docteur ! – Au revoir, messieurs-dame.

Le couple heureux de ces nouvelles rejoindra le véhicule, tout au long du trajet, bébé bougera, la maman mettra ses mains sur le ventre pour le réconforter.

Depuis l’intérieur : J’arrive à toucher les extrémités de tout mon corps, c’est amusant. Je fais de même avec le cordon ombilical, je joue avec, je suce même mon pouce.

À cette demi-grossesse, je mesure 19 centimètres pour 460 grammes.