Une histoire du monde médiéval

Extrait de l'introduction

Vers 400 après J.-C, les forces qui se pressaient aux portes des empires, que ce soit l'Empire romain, l'Empire perse ou l'Empire chinois, font partout irruption. Poussées par les Huns, originaires d'Asie, des hordes barbares cherchent alors refuge dans les Empires d'Orient ou d'Occident. En quelques décennies, Wisigoths et Vandales, Francs et Alamans, Ostrogoths et Burgondes, Suèves et Alains désintègrent ainsi, morceau par morceau, les empires constitués depuis des siècles. En réalité ce sont ces empires qui vont transmettre leur culture, leurs institutions et leur religion. À tel point que les peuples des steppes qui ont franchi la Grande Muraille abandonnant leurs moeurs rudes, adoptent le costume chinois et deviennent les plus fervents défenseurs du bouddhisme. Tandis que dans l'Empire romain, après la tourmente des invasions, Romains et Barbares se retrouvent sur le forum, dans les thermes et applaudissent, comme naguère, les jeux du cirque.

Plus d'un siècle après, la partie semble définitivement perdue pour l'Empire romain, malgré la tentative sans lendemain de Justinien pour en reconstituer l'unité.

Surtout, l'Église catholique avec son réseau d'évêchés et de ses diocèses tend à devenir la seule structure stable au-delà des divisions politiques et des invasions. De fait la papauté semble bien avoir choisi un autre glaive pour soutenir son activité missionnaire, s'accommodant des nouvelles populations barbares. Car la légende selon laquelle une colombe apporta du ciel la «sainte ampoule» qui servit à l'évêque Remi pour oindre Clovis traduit bien le choix qui va faire de la France, pendant près de 1 300 ans, la Me aînée de l'Église et de l'Île-de-France la région qui en deviendra le coeur. C'est là en effet, entre Loire et Escaut, que se fondent les aristocraties franque et gallo-romaine, que s'édifient à Tours, à Saint-Denis et à Poitiers les premières basiliques et que des âmes d'élite préfèrent, comme ailleurs en Europe, la perfection de la vie monastique à la médiocrité du temps. Une médiocrité que tente de conjurer l'Empire byzantin, où brille alors de nulle feux les grandes métropoles d'Antioche et d'Alexandrie, où prolifèrent écoles et bibliothèques, et où les grands penseurs païens rivalisent avec les tenants du christianisme.

Mais au VIIe siècle de notre ère, une poussière de tribus, qui vivaient du commerce et d'une maigre agriculture de subsistance, se taillent un empire qui s'étend de l'Afghanistan à l'Espagne. Cette expansion de l'islam est bien un phénomène unique dans l'histoire. En 632, quand meurt Mahomet, sept ans avant Dagobert, l'influence de la nouvelle religion se limite à l'Arabie, une terre revêche, isolée, presque entièrement vouée au désert. Trente années plus tard à peine, les grandes chevauchées des rudes Bédouins déferlent sur la Syrie, l'Égypte, la Mésopotamie... Mahomet n'a-t-il pas promis aussi que tout combattant mort à la bataille est assuré d'entrer au paradis ? L'Empire perse est détruit, l'Empire byzantin est menacé. Et les hommes du désert se sont transformés avec aisance en militaires de génie, en cavaliers émérites, en hardis navigateurs et en habiles administrateurs.

Comment expliquer autrement le fait que l'islam a pu alors si facilement assimiler toutes ses conquêtes ?

Pendant les années 660-670, alors qu'agonise la Gaule mérovingienne, les califes omeyyades édifient à Damas et à Jérusalem, des mosquées monumentales, mettent en place une administration d'État, en nommant des gouverneurs et en collectant des impôts et se lancent à la conquête du monde, édifiant un empire qui s'étend des Pyrénées aux rives de l'indus, du Sahara à la mer d'Aral.