Au service du surnaturel - Saison 3 : Riley, Épisode 4

Notre trajet sur cette piste ne fut pas long. Les véhicules s’enfoncèrent bien vite dans la dense végétation d’une forêt tropicale chargée d’humidité, avant de s’arrêter au milieu de la boucle qu’ils avaient prise. Je fus l’une des premières à descendre, suivie des autres, mon glaive invisible en main et jetant des regards de tous côtés : ce milieu abondant et verdoyant pouvait dissimuler bien des ennemis. Je laissai le reste de la délégation s’engager à pied sur la passerelle en bois suspendu entre les deux versants d’un précipice qui avait pour fond la cime de centaines d’arbres. Un pont assez étroit, et faisant tout de même au moins deux cents mètres de longueur. [Je n’avais pas peur du vide ; j’étais accro aux sensations fortes, mais ça vous avez dû vous en apercevoir, non ?] Je jetai un œil en arrière pour voir les SUV retourner vers la piste et emprunter à nouveau le passage vers le parking souterrain du building, puis m’engageai à mon tour sur le pont qui tanguait sous l’impulsion de ceux qui s’y trouvaient déjà. Comme toujours dans ce genre de situation, j’avais l’impression d’être dans la peau de pépé Jones en train de vivre l’une de ses aventures. C’est sûr que d’avoir comme ancêtre le fameux archéologue Indiana était inspirant, mais engendrait également l’envie de vouloir faire mieux que lui. Enfin, ça, c’était ce à quoi j’aspirais...

[Bon, pour info, si certes mon arrière-arrière-grand-père avait été prof d’histoire à Harvard, près de Boston USA (une couverture vis-à-vis des humains) et qu’il avait découvert bon nombre de trésors perdus, il avait surtout été un veilleur dont la mission était de retrouver des artefacts de pouvoir tels que Mjöllnir, le fameux marteau du dieu Thor, ou encore le Sceau de Salomon – ce fameux roi qui avait trouvé un moyen de créer un objet capable de commander à certaines catégories de surnaturels, dont les démons et les génies. Bref, ses découvertes ont permis à la fois de protéger les nôtres, et d’éviter que le monde ne sombre dans le chaos. Intégrer le groupe de veilleurs/chercheurs était mon objectif, mais le Conseil a brisé mon rêve en osant me rétorquer que je n’étais pas suffisamment intelligente. La bonne blague, moi qui ai un QI de 170, comme votre Einstein pour vous donner une idée. Autant vous dire que je l’ai encore mauvaise pour ce refus. Bon, après, ça m’aurait grave gavée de devoir passer une bonne partie de mon précieux temps la tête dans les bouquins à trouver des indices sur les emplacements de ces objets magiques. Comme vous avez pu le voir, je suis une femme d’action, moi ! Aller chercher les artefacts dans des endroits improbables, suis partante ; passer ma vie dans les bibliothèques, certainement pas !]

Alors que les autres atteignaient enfin l’autre côté du précipice, je sentis une présence derrière moi. Je me tournai et vis des centaines de silhouettes fantomatiques sortir de la dense végétation : les dames blanches.

— Oh que non ! criai-je à certaines d’entre elles qui s’étaient avancées en flottant au-dessus du sol.

Elles s’étaient un peu trop rapprochées à mon goût des armatures du pont suspendu.

— Putain, les filles, ça va mal se passer entre nous, grognai-je en espagnol.