Une soeur si lointaine

Après la cérémonie, on transporta le cercueil sur le corbillard qui attendait devant le porche. De nombreux badauds s’étaient rassemblés pour voir les six chevaux harnachés de plumes noires ou argent, les somptueuses couronnes, le Tout-Londres en deuil… et cette mince silhouette enveloppée d’un voile noir.

Courageusement, la fille unique du défunt prit la tête du cortège qui, lentement, se dirigeait vers le cimetière.

La comtesse Connaught regagna l’hôtel particulier de Lamborne en compagnie de sa nièce.

Taylor, le majordome, était allé à l’église avec les autres domestiques, mais il était tout de suite revenu prendre ses fonctions, et ce fut lui qui leur ouvrit la porte.

— Mademoiselle Thelma, je ne sais que dire…

La jeune fille rejeta en arrière son voile noir.

— Merci, Taylor. Dans certaines circonstances, les mots sont inutiles. Je devine ce que vous ressentez.

Le majordome enveloppa sa jeune maîtresse d’un regard soucieux.

— Pouvez-vous demander que l’on nous apporte du thé, Taylor, s’il vous plaît ? demanda la comtesse.

— Tout de suite, milady.

— Il faut que nous prenions des forces pour faire face à tous ces gens, soupira-t-elle.

Thelma fronça ses sourcils à l’arc parfait.

— Les gens ?

— Ceux qui vont venir te présenter leurs condoléances.

La jeune fille avisa les piles de lettres qui s’amoncelaient sur le plateau d’argent du hall.

— Des condoléances ? fit-elle avec un geste désabusé. En voilà déjà.

— C’était à prévoir. Ton père connaissait beaucoup de monde. Il était apprécié et respecté.