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Commentaires de livres faits par Virgile

Extraits de livres par Virgile

Commentaires de livres appréciés par Virgile

Extraits de livres appréciés par Virgile

Dix trucs bien dégueu que les filles font quand même

Même quand elle sont habillées comme des poupées Barbie et se comportent comme des princesses avec leurs mecs, les filles font caca. Et ce n'est pas tout. Il leur arrive aussi de :

Se ronger les ongles de pied

Tremper directement leurs frites dans le pot de mayo

Presser leurs boutons blancs devant le miroir en poussant un petit cri de joie quand ils explosent.

Regarder Les anges de la téléréalité sur NRJ12.

Porter la même culotte deux jours de suite.

Faire des concours de prouts en cachette avec leurs enfants.
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Votre mari refuse de vous lécher ? Faites comme moi, faites-vous brouter par le facteur !
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Top 10 des zones érogènes masculines :

1. Le pénis

2. La zigounette

3. La quéquette

4. La queue

5. Le zizi

6. Le zob

7. Le chibre

8. La bite

9. Le braquemard

10. Le zguègue
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Les grands auteurs sont des cons

"Les femmes son comme des mirroirs, elle réfléchissent mais ne pensent pas." (Arthur Schopenhauer)

***

Arthur Schopenhauer est comme un appareil photo bas de gamme : il produit des clichés tout pourris.
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"Celui qui cherche une femme belle, bonne et intelligente n'en cherche pas une, mais trois" (Oscar Wilde)

***

Et c'est un homme qui connait bien les femmes qui vous le dit puisqu'il était homosexuel.
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date : 05-09-2017
L'occident croit sa modernité... moderne. L'émancipation des femmes, bien réelle, n'y est pourtant que la radicalisation d'un état primitif de l'humanité. Homo Sapiens n'était guère hostile à l'avortement. On pourrait en dire autant de la lutte pour les droits des homosexuels puisque les communautés primitives résiduelles étudiées par les anthropologues n'apparaissent que très rarement homophobes.
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date : 13-10-2017
Premières pages :


Pablo
C’est un nuage qui m’accueille. Quand j’ouvre la porte
je vois couler sous le plafonnier cette nappe brune,
épaisse, et puis eux, qui baignent dedans. Ixe, ça ne le
dérange pas qu’on fume chez lui, du moment qu’on ne
fume pas de clopes. Je le regarde, entre lui et moi c’est
presque opaque. Il plane dans le brouillard. On est bien
reçus chez toi, je dis. Je n’ai pas le temps d’ajouter quoi
que ce soit que déjà il me pose sa question rituelle. Tu
veux rouler ? Je dis oui.
La disposition de la pièce n’a jamais changé, alors je
me mets sur le petit tabouret inconfortable, celui sur
lequel je m’assois toujours, près de la table basse. Ixe
est à son bureau, à gauche de l’entrée, à côté de son lit
toujours bien fait, à croire qu’il n’y dort jamais. Pourtant
il ne sort pas beaucoup. Il attend qu’on vienne. Il
est à la sortie de la ville, il y a un pré derrière, et la forêt
plus loin. C’est calme. Cette maisonnette, il l’appelle sa
grotte. Il se serait bien vu homme des cavernes comme
il dit souvent.
Il est pas joli ton œil, me dit Poto, installé au fond
de la pièce. Il mélange déjà les cartes. D’abord je ne dis
rien, je pense juste au fait que je n’aime pas ce plafonnier,
cette lumière sèche, et puis je soupire, et je dis les
gars, vous étiez là, vous avez vu, alors y a rien à dire de
plus. Ça s’est pas joué à grand- chose il fait, et moi je lui
réponds qu’on ne joue pas. Sucré, qui vient s’asseoir à
côté de lui, ajoute qu’il vaut mieux y aller mollo sur le
réconfort.
Chez Ixe il y a toujours de la musique. Ça ne dérange
pas Poto, qui passe son temps à décortiquer les rimes des
chanteurs qu’on écoute. Il demande à Ixe de remettre en
arrière, parce qu’il a cru entendre une rime multisyllabique,
il dit. Écoutez les gars, la rime en -a- i- eu là, vous
avez grillé ou pas, et moi je réponds non, j’étais pas attentif.
Sucré confi rme, alors que Ixe, penché sur son bureau,
ne dit rien. Il s’apprête à couper une plaquette. Elle est
posée sur une planche à découper, couteau de boucher
à côté. T’as besoin d’un truc toi Jonas ? il me demande.
Je dis ouais, fais- moi un vingt- cinq comme d’habitude,
et je dois hurler pour qu’il me comprenne. Pour couper
un morceau comme celui- ci, c’est chacun sa technique.
Les plus précautionneux chauffent la lame. Mon autre
pote qui vend du shit, Untel il s’appelle, il met carré-
ment la plaquette au micro- ondes. Ixe, lui, il utilise un
sèche- cheveux.
Des feuilles du shit une clope. Ixe pose ça sur la table,
devant moi, parce qu’il trouve que je mets du temps
à m’activer. Ça, c’est d’la frappe il dit, y a pas besoin
d’en mettre beaucoup. Il dit toujours ça, parce qu’il me
connaît. Il ne veut pas que je m’éteigne trop vite. Je le
regarde du coin de mon œil blessé, il a les yeux rouges,
il n’est pas tout neuf. Je lui fais la remarque et ça le fait
rire en même temps qu’il se frotte les orbites. Je comprends
mieux pourquoi il me dit de ne pas trop charger.
Bon on joue ou quoi ? Il est chaud Poto. Attends je
roule, et puis laisse- moi fumer un peu avant, que je me
mette en condition. Hé Ixe vas-y baisse la musique j’ai
mal à la tête. Poto annonce qu’il va me mettre une branlée
aux cartes et sur le coup ça me fait bizarre d’entendre
sa voix aussi distinctement. Je rigole en tapotant ma
cigarette contre l’ongle de mon pouce. Je fais ça pour
bien tasser mon marocco, ce morceau de clope qui va
servir de fi ltre. C’est plus confortable, plus doux à fumer
qu’avec un toncar, qui fi ltre que dalle d’ailleurs, vu que
ce n’est qu’un bout de carton roulé sur lui- même. Quand
j’étais petit, je disais que les fumeurs de marocco c’était
des fragiles. Ce n’était pas concevable, pour moi, qu’on
veuille adoucir la chose. Aujourd’hui ça n’est plus si festif.
Passer du toncar au marocco, c’est un peu gagner en
maturité.
C’est quoi le pilon, je demande à Ixe. Il me dit c’est
du comme t’aimes, du noir qui colle. Je dis ah ouais, et
puis j’y mets un petit coup de fl amme, furtif, avant de
le porter à mon nez. Il fl eure bon celui- ci. D’ordinaire le
shit on l’effrite, on le chauffe et on en fait des miettes.
Celui- ci ce n’est pas possible, il est trop collant. Du coup
j’en fais une boulette que je pique au bout d’un crité-
rium qui traîne là et j’y mets le feu. Quand c’est du bon
ça fait des bulles. Ça dure trois secondes. Mêlé au tabac,
le shit se met à fondre, il imprègne chaque brin, ils ne
se mélangent plus, ils fusionnent. Comme si à force de
battre un jeu de cartes on fi nissait par n’en avoir plus
qu’une. C’est doux sur les doigts. Ça sent bon. Poto dit
que ce n’est pas bien de cramer le pilon comme ça, parce
que la combustion c’est ce qui libère le principe actif. Il
ajoute que ça vaut aussi pour Ixe avec son sèche- cheveux
à la con. Je lui dis t’inquiète il va te mettre une tarte celuilà,
et là il me répond que c’est lui qui va me mettre une
tarte si je ne me dépêche pas. Poto il est toujours impatient.
Agité. Ce soir il n’insulte pas trop, ça va.
Je mélange longtemps. Ça me prend toujours un temps
fou de rouler. Un joint roulé à l’arrache je trouve ça vulgaire.
Comme du bon vin dans un gobelet. On me fait
souvent la remarque, et je réponds toujours la même
chose, vous êtes des sagouins, vous ne respectez rien.
Poto bat tellement les cartes depuis cinq minutes qu’il y
a des chances qu’il les ait remises dans l’ordre. Il annonce
qu’il va sortir un 8, et retourne la première carte du
paquet. C’est un roi de carreau. Ixe annonce une dame,
et c’est un 2. Sucré ne joue pas. Je dis roi, et je touche
celui de pique. C’est un signe, je dis, que je vais vous en
mettre plein la gueule.
J’ai léché, j’ai roulé. Je tasse le joint en le tapotant sur
l’ongle de mon pouce. Poto me regarde attentivement,
ça le fait toujours rire de voir le soin que j’apporte à la
chose. En tenant le spliff dans ma main gauche je prends
mon feu que j’allume avec la tête en bas, et la fl amme
revient sur la partie métallique qui entoure la tête du
briquet. Ça chauffe le métal. J’y pose mon joint debout,
ça chauffe le marocco. Le tabac qu’il contient se ramollit
et en refroidissant se constitue en une sorte d’amalgame
homogène, ça empêche la fuite de brins qui se
déposent sur les lèvres ou sur la langue. Je porte alors le
joint à ma bouche, l’allume, tire la première taffe, puis
me redresse sur mon tabouret. J’ai roulé un fumigène.
Grosse fumée blanche, Habemus papam. Sucré m’interroge
du menton. J’suis bon les gars.
Je n’ai pas écouté Ixe, j’en ai mis beaucoup. La
deuxième taffe, je la contiens dans mes poumons et je
coupe ma respiration. Diaphragme tendu, si je relâche
trop vite c’est la quinte de toux. Je la connais celle- là. Grimace.
Oh cette gueule que tu tires me dit Ixe, ferme- la
je réponds, avec la voix tamisée parce que ça commence
à faire un moment que je n’ai pas expiré. La toux c’est
quand même bénéfi que à l’effet du cannabis, ça ouvre
des veines capillaires dans la gorge, et ça fonce direct au
cerveau. C’est comme entrer par la porte de derrière en
marchant sur un tapis rouge.
Je propose qu’on commence à jouer parce que y en a
marre. Sucré dit vas-y j’avoue, et Poto dit wesh comment
ça, c’est toi qu’on attend depuis tout à l’heure, mais Ixe
nous dit que Miskine va arriver, alors on va l’attendre.
Ah bon il vient lui ? Hey mais vous êtes relous là dit Poto
après avoir posé les cartes. Un 4 ! Non, c’était un 8. À moi,
un 7 ! Un 7. T’as d’la chatte il dit.
Je me passe la main sur le visage. Il y a des bosses.
C’est vallonné. Je ne vois pas grand- chose de l’œil gauche,
ma paupière gonfl ée le recouvre. Je n’ai pas su gérer sa
droite. Et ma main gauche toujours baissée, à l’épaule.
Pas étonnant. Dans la voiture on ne s’est presque rien
dit avec Sucré, mais je me rappelle qu’il a suggéré que je
mette de la glace. Sur le moment je n’ai pas acquiescé.
Ça m’empêcherait de jouer aux cartes. Alors que là, tout
de suite, ce que je veux c’est qu’on distribue, qu’on joue,
qu’on la ferme, et qu’on fume.
Vas-y on se fait une partie de chauffe. Poto il est
motivé, il prend carrément le paquet des mains de Ixe,
et il commence à mélanger comme ils font les croupiers,
sauf qu’il galère un peu, et nous on se fout de sa
gueule, du coup il distribue. Je tire une grosse latte pour
fêter ça. Sucré est en train de rouler, il dit qu’il jouera la
prochaine. Quatre cartes fermées devant nous, deux en
haut, deux en bas. Poto pose la pioche au milieu de la
table, et je la repousse un peu sur le côté pour qu’on ait
la place de jouer. Ixe dit que je l’ai trop chargé le spliff,
il casse la tête.
On regarde nos cartes du bas, pas celles du dessus.
2-7. C’est pas mal ça. 2-7, faut que je le retienne, 2-7. Ixe
a distribué et il est à ma droite, donc je commence. Je
tire un 7 dans la pioche. Si je veux l’ajouter à mon jeu, je
dois l’échanger contre l’une des miennes. Je la place audessus
de l’autre 7, et celle que j’avais là je la retourne
et la pose au milieu de la table. Et merde, un as. Ça fait
les affaires de Poto qui s’en saisit rapidement et la pose
dans son jeu, en haut à gauche. À ne pas perdre de vue
si j’ai l’occasion de faire un échange. Bon, pour l’instant
2-7-7, 2-7-7. Vas-y repasse le oinj, faut que je me rappelle
de mes cartes là. Ixe pioche de la main droite en me
passant le joint de la main gauche. Il a l’air content de
son jeu, mais bon souvent il bluffe, faut se méfi er. C’est
à moi. Une dame. Ça vaut dix points une dame, c’est de
la merde, alors je la jette au milieu et je soupire. 2-7-7.
Poto garnit son jeu à chaque tour, il connaît ses quatre
cartes maintenant. Il a toujours son as en haut à gauche.
2-7-7. C’est mon tour, j’aimerais bien piocher quelque
chose. Un 7. C’est bon ça. Je le mets dans mon jeu, en
haut à gauche, et la carte que j’avais là c’est un 2. Poto
est content, il dit que je le mets bien, qu’il a bien fait de
se mettre après moi, et quand je lui dis de la fermer il me
traite de sale enculé. Il a jeté un 10 quand il a pris le 2,
et Ixe prend ce 10, ça veut dire qu’il prépare un truc, on
prend pas un 10 si on n’en a pas au moins un dans son
jeu. Si je tire une bonne carte, je peux les mettre dans la
merde. C’est mon tour. Je tire un as. Je peine à contenir
mon excitation et dans le même temps je jette mes trois 7
et pose l’as à côté de mon 2. Tous deux me regardent, ils
espèrent que je ne vais pas le dire. Pablo.
Putain ! crie Poto, et il ajoute que sa mère la pute le
jeu vas-y avec deux tours de plus j’te faisais un coup de
malade. Je me marre en regardant leurs mines défaites.
J’ai dit Pablo, ça veut dire que je pense être celui qui a
le moins de points dans son jeu. Ils ont un tour en plus,
moi je ne joue plus. Poto tire un 9, il est dégoûté. J’ai
as-2, soit trois points. Quand Ixe approche sa main de
la pioche, je tremble d’excitation. Il me regarde et il dit
Jonas, si je pioche une bonne carte, t’es mort. Il pioche.
Oh ! il fait, et tout en riant il prend ses quatre cartes
et les remplace par celle qu’il vient de piocher. Il avait
quatre 10, l’enfoiré. Je retourne mes cartes, as-2, j’ai trois
points. Poto retourne ensuite les siennes, as-2-3-3, neuf
points. C’est bon. Bon alors Ixe c’est quoi la carte que t’as
piochée ? Il la retourne. Roi de pique. Le mec a fait zéro.
C’est rarissime, il fallait que ça me tombe dessus. Poto
est debout, il pointe la pioche d’un doigt qui tremble,
il hurle que si c’était lui qui avait tiré le roi de pique il
l’aurait échangé avec son double de 3 et qu’ainsi il aurait
eu trois points seulement. Ixe lui répond cherche pas je
t’avais dit que le talent était de mon côté. La chatte oui,
que je lui dis. En ratant mon Pablo j’écope de cinquante
points. Ixe se lève et se dirige vers son bureau pour y
chercher un papier et un crayon et qu’on y note le score.
Je proteste parce qu’on avait dit que c’était la partie de
chauffe, et là on m’engueule et on me dit comme quoi
je suis une pédale. Sucré me fait bah putain c’est pas
ton jour. Poto l’a mauvaise. Distribue ! il me dit comme
s’il m’embrouillait dans la rue. Roule, je lui réponds, en
posant mon vingt- cinq, encore chaud d’avoir été sous le
sèche- cheveux, sur la table.
Ixe m’annonce le score pour me foutre la rage : zéroneuf-
cinquante. On la fait en douze, je dis. En sept, il
répond. Les autres le rejoignent. J’ai beau évoquer les
parties en trente- cinq qu’on fait parfois, rien n’y fait.
Ils n’ont pas envie d’aller jusqu’au bas de la page. Il y
a même Sucré qui ne veut pas rentrer trop tard. Bon,
j’ai six parties pour gagner le jeu, faites pas les frigides
et dites Pablo un peu, que je vous nique vos races. Je
prends les cartes, et je les mélange consciencieusement
sans essayer d’imiter les croupiers.
Miskine vient d’arriver. Tchek de l’épaule, accolade sur
l’omoplate. Bien ou quoi, alors ça dit quoi ? Rien t’as vu
ça galère. Il me contourne et salue Poto et Sucré. Tchek
de l’épaule, accolade sur l’omoplate. Bien ou quoi ? Je
me rassois.
Des feuilles du shit une clope, c’est ce qu’il pose sur la
table basse. On dirait un ours un peu, Miskine. Sa nonchalance
lui donne une allure pataude. Il pue l’indolence,
même s’asseoir on dirait qu’il fait un effort et que ça le
fait chier. Ixe, le teuchi que tu m’as fait la dernière fois il
tabasse de ouf, j’te jure, gros, celui- là j’le fume à midi ma
journée elle est fi nie, j’m’endors à 14 heures j’me réveille
à 20 heures, ah ouais, j’te jure. Il parle fort. Il parle fort et
puis il s’arrête. Il se tourne vers moi avec un air dépité. Il
me dit Jonas, t’as perdu ?, et je réponds wesh, tu m’avais
déjà vu avec une gueule pareille, en montrant mon œil
gauche. Il dit non, je dis bah voilà. Tu devrais mettre de
la glace, dit Sucré, et Ixe dit que Sucré a raison, et Poto
dit ouais c’est clair, et je leur dis venez on joue aux cartes.
Apparemment, Miskine s’est lancé dans un bizness
avec Untel et ça n’a pas tourné comme ils l’auraient
voulu, alors il a besoin que Ixe ramasse certaines de ses
casseroles. Ixe il n’est pas enchanté. Quand ils parlent
de leurs trucs moi je n’écoute pas trop. Non seulement
ça ne m’intéresse pas, mais en plus c’est mieux de ne
pas savoir grand- chose quand on traîne avec ces garslà.
Encore que ce ne sont pas des gros poissons non
plus. Ixe, il fait ça pour la famille, l’entourage. Il saisit
des opportunités. Discret le mec. Miskine lui il aimerait
bien peser dans le milieu. Mais c’est un fl ambeur, une
petite frappe. Le grossiste, c’est Untel. Nous on gravite
autour. Des satellites.
Je reprends le bout de teuchi. Mon joint je l’ai calciné,
je ne m’en suis même pas rendu compte. Je demande à
Ixe si c’est lui qui a mon briquet, mais il ne m’entend
même pas parce qu’il est trop occupé à écouter Miskine
qui lui prend la tête avec ses histoires. Poto a fi ni de rouler
son joint et il est sur le point de l’éclater. Et sinon
quoi de neuf je demande à Poto. Il dit rien de fou, il ne
trouve pas de taf, il ne cherche pas tellement d’ailleurs.
Il a encore droit à quatre mois d’indemnités après avoir
travaillé dans l’usine de pneus, donc il n’est pas pressé, il
profi te un peu. Et sinon, ça baise un peu en ce moment je
demande, et ça fait marrer Sucré, parce qu’elle n’est pas
de moi celle- là, mais d’un pote à nous qui adore la poser.
Poto se passe la main sur son crâne rasé. Là y a rien,
j’suis en chien il dit, et je ne m’attendais pas tellement à
une autre réponse. C’est quoi ton style de meuf à toi je lui
demande. Tout ce qui est à un guichet il répond. Pourquoi
? Parce que au moins là elle est coincée la meuf. Je
ris en tapotant la clope sur mon ongle. Et la p’tite que tu
fréquentais là, elle est passée où, on te voyait plus pendant
un moment. Elle m’a lâché il dit, elle voulait pas
être un plan cul, mais tu verras Jonas, elle va s’en mordre
les doigts, tellement d’ailleurs qu’elle pourra même plus
se les caler dans la chatte. Je ris. Il me demande et toi,
t’as quelqu’un en ce moment, et je soupire, je dis laisse
tomber, c’est mieux si j’en parle pas.
Poto me tend son joint pour que je le passe à Ixe, et
je tire une latte dessus, la douane ça s’appelle. Miskine
me tend le cul de joint qu’il avait déjà en arrivant pour
pouvoir en rouler un nouveau, mais je lui dis vas-y fume
toi, moi je roule.
Ixe s’empare du paquet de cartes et les mélange sommairement,
puis distribue. Je n’ai pas fi ni de rouler mais
je me dépêche. Bon, on en était où, demande Ixe. Zéroneuf-
cinquante. Vas-y moi je joue, dit Sucré en se redressant,
et je dis bah vas-y on revient à zéro du coup, et
Poto dit vas-y t’as de la chance. Miskine demande à quoi
on joue, au Pablo lui répond Ixe. Il me regarde d’un air
interrogateur, et très vite, parce que ça m’emmerde, je lui
explique que c’est un jeu où il faut faire le minimum de
points sachant qu’on ne connaît que deux de ses quatre
cartes au début, et qu’on peut alimenter son jeu en piochant
et sachant aussi que piocher un 7 permet de voir
une carte dans son propre jeu, qu’un 8 permet de faire
un échange mais sans regarder les cartes et qu’un 9 te
donne le droit de regarder une carte dans le jeu d’un
autre et qu’on peut constituer des doubles des triples
voire des quadruples mais c’est rare, sauf quand t’as
d’la chatte comme Ixe, et les échanger contre une carte
qu’on pioche et à terme si tu penses être celui qui a le
moins de points dans son jeu tu dis Pablo et les autres
jouent un tour et là on retourne les cartes et si tu réussis
ton Pablo tu marques zéro point sinon tu en prends
cinquante, comme moi juste avant. Ah, et le roi de pique
vaut zéro, chaque carte vaut sa valeur jusqu’à 10 puis les
têtes valent dix aussi. Regarde- nous jouer tu vas comprendre.
Il me répond qu’il va surtout enfi n rouler son
oinj vu qu’on fait que d’parler depuis tout à l’heure.
Ixe se lève pour ouvrir la fenêtre tandis que je lèche le
collant. On aperçoit la fumée attirée par le courant d’air,
elle change de direction, lentement aspirée. Elle a trouvé
une issue. La fumée peut bien sortir, on en créera une
nouvelle, en tout point semblable. En serait- il de même
pour moi si je me jetais dans le vide d’ici ? Rien de neuf
à part les cartes qu’on vient de me donner. Ixe, en reposant
les siennes, me guette du coin de l’œil et sourit
comme un vicelard. Je sens qu’il va encore nous la faire
à l’envers. J’allume mon joint. Je regarde mes cartes,
dame- roi. Et ce n’est pas le roi de pique.

Soixante- sept cinq
En premier c’est l’odeur aigre, piquante, qui me rappelle
où je mets les pieds. Ce mélange de sueur et de sang,
auquel j’ai largement contribué, et qui imbibe ces murs
imprégnés de la joie de souffrir. J’entre et déjà je ne sens
plus l’odeur. Je vois le ring, les sacs et les miroirs. Le petit
Victor est déjà en train de sauter à la corde. Sucré vient
d’arriver lui aussi, il discute avec Farid qui bande ses
mains, à côté du ring. Farid, il n’enroule pas ses bandes
avant de les mettre. Je trouve que ce n’est pas pratique.
Je vais pour les saluer quand arrive du vestiaire monsieur
Pierrot qui me dit c’est à c’t’heure- ci que t’arrives,
faut qu’on cause. Je dis bonjour monsieur Pierrot, et lui il
inspecte mon visage, il demande ça va ton œil ?, je dis oui,
et à sa manière de me scruter j’ai l’impression qu’il n’y a
pas que l’hématome qui le préoccupe. J’ajoute que je suis
prêt à reprendre et il dit que ça c’est à lui d’en décider.
J’ai beau dire que ça fait deux semaines déjà, il n’est pas
convaincu. Il est tout petit le vieux, il doit lever le menton
pour me regarder dans les yeux. En plus il se tient très
près. Avec sa tête ronde et son visage buriné, son nez tout
plat et ses yeux exorbités, on ne sait jamais trop ce que
c’est que cet air qu’il a sur la gueule. Pour autant ça ne
tend jamais vers la sérénité. Il paraît même affolé quand
il me demande ce qu’on fait maintenant. Comment ça,
ce qu’on fait maintenant. C’est pas à vous d’en décider ?
Il parle moins fort tout à coup, il approche son visage si
c’était possible, et il me dit Jonas, moi j’avais des projets
pour toi, mais tu me facilites pas la vie. Je ne dis rien. Le
vieux, il en a formé des boxeurs, depuis quarante ans. Ça
fait un bail déjà qu’il n’a pas eu de professionnel. Depuis
Paulo, qui vient mettre les gants de temps en temps.
C’était il y a dix ans. Il a vieilli le vieux. Il continue parce
que s’il arrête il en meurt. On se regarde. Il prend un air
grave, ça me met mal à l’aise, et il me demande qu’est- ce
que tu veux, toi, en claquant son poing fermé sur ma poitrine.
Je sais qu’il voudrait m’entendre dire que je veux me
reprendre en main, retrouver le niveau que j’avais quand
j’ai eu l’opportunité de passer pro, l’année dernière. Juste
avant que je commence à m’éloigner de la salle. Il veut
m’entendre dire que je reviens pour de bon, que j’arrête
de jouer les gagne- petit. Il répète sa question, plus ferme
encore. Qu’est- ce que tu veux. La corde, je fi nis par dire.
Je veux sauter à la corde.
Dans le vestiaire je salue les gars en train de se préparer.
Cyril et Virgil. La pièce n’est pas très grande. Deux
banquettes de faux cuir, à gauche et à droite, avec des
portemanteaux au- dessus. Un seul chiotte. Deux pauvres
douches qui nous obligent à attendre notre tour parfois.
Au fond, le sauna, ce cube de bois où la promiscuité est
la règle, et puis en face de lui le vestiaire des fi lles, renfoncement
exigu dans lequel à trois on commence déjà
à se marcher dessus. Pour leur intimité on a installé une
tringle sans trouver mieux qu’un rideau de douche.
Je m’installe à ma place, celle qui reste libre jusqu’à ce
qu’on ait la certitude que je ne vais pas venir. J’étais assis
là le jour où monsieur Pierrot m’a bandé les mains pour
la première fois. Ce jour- là j’ai compris qu’il n’était pas
du tout en colère, mais qu’en réalité il ne savait pas expliquer
quelque chose sans avoir l’air énervé. Ça l’avait fait
sourire quand je lui avais fait la remarque.
On utilise un ancien modèle de balance à crans, avec
une barre horizontale le long de laquelle on déplace des
poids. Ça fait des tic tic tic quand on les bouge. Monsieur
Pierrot voudrait me voir en poids moyens, il me
trouve trop maigre, il aimerait que je m’étoffe physiquement.
En déplaçant les crans sur la barre horizontale je
soupire, et Farid qui passe par là dit que c’est normal que
Jonas puisse pas prendre de poids avec tous les bédos
qu’il fume. Je m’assure que monsieur Pierrot ne l’entend
pas dire ça. Il aime bien chambrer Farid, il a une grande
gueule. S’il n’était pas drôle j’aurais envie de lui en mettre
une. C’est lui qui m’a donné mon surnom, Deux Rounds et
demi. Parce que je n’ai jamais le coffre pour être bon dans
le dernier round. Toujours à l’arrache les fi ns de combat.
Quand j’ai assez bien géré pour avoir de l’avance ça va,
mais quand c’est plus serré, c’est une autre histoire. En
descendant de la balance je dis soixante- sept cinq, et Farid
l’écrit sur le cahier. Faut que tu prennes cinq kilos dit le
vieux, qui m’a entendu. Moi je dis que je suis bien à ce
poids- là, c’est moins d’efforts, et lui il dit non, tu manques
de frappe, et je hausse les épaules. De toute façon je ne
cherche jamais vraiment à frapper fort moi. Je ne suis pas
un cogneur. Je fais plutôt dans l’escrime. L’évitement. La
fuite. Alors ce n’est pas plus mal si je suis léger. Mais lui
il ne veut pas en entendre parler. L’idée c’est de devenir
plus fort. Il faut aimer ça, souffrir.
Je sors mes bandes du sac, complètement défaites,
telles que je les ai retirées à la fi n de mon combat. Elles
puent la boxe. J’en prends une et en pose l’extrémité sur
ma cuisse, afi n de l’aplanir et défaire les plis. Je la roule
d’abord, pour ne pas la voir pendre au sol pendant que
je la mets, c’est gênant et ça fait des plis. Je commence à
l’enrouler en prenant soin de bien la serrer. Je roule de la
main droite et je maintiens la bande de la main gauche.
Pour éviter les plis. Et je roule. La bande fait quatre
mètres.
Sucré, qui vient d’entrer dans le vestiaire, est presque
prêt déjà. Il a la même gueule que d’habitude, sourcils
froncés. Chez lui ça ne veut pas forcément dire qu’il a
un souci. Sucré, il a constamment la gueule d’un mec
ébloui par le soleil. C’est avec lui que j’ai franchi le seuil
de cette salle pour la première fois. On a grandi ensemble.
Il me tranquillise parce qu’il est simple. Il ne trouve pas
ça honteux de se contenter de peu. C’est un bon boxeur,
il est vif malgré son surpoids. Il a arrêté il y a deux ans,
depuis qu’il travaille. Il vient de temps en temps pour
s’entretenir, encore qu’il s’est engraissé, il trimballe une
sacrée bedaine. Ça ne l’empêche pas de venir s’en prendre
plein la gueule et faire admirer son uppercut en sortie de
garde, ainsi que l’élasticité de son buste. Il adore boxer,
plus que moi. Prendre des coups ça ne le dérange pas. À
chaque entraînement il monte dans le ring, alors que moi
il m’arrive de prétexter une blessure, une fatigue, une dent
qui bouge. Il a son short noir et vert qu’il porte à tous les
entraînements, et un K- Way en haut. Je t’ai déjà dit que
ça sert à rien de porter un K- Way pour s’entraîner Sucré.
Ça me fait transpirer il dit. Ouais mais tu perds que de
l’eau, du coup tu te déshydrates et t’es moins performant
tu vois. Bah on verra ça dans le ring, si j’suis moins performant.
Ok je dis, si j’te nique ta race tu mets plus jamais
de K- Way pour t’entraîner. Il soupire dans un sourire,
mets tes bandes Jonas, et ferme ta gueule. On rigole. Je
dis j’arrive.
Je saisis une bande, en place l’extrémité contre la
paume de ma main, et la maintiens à l’aide de mon pouce.
Je fais le tour, deux fois, puis descends sur le poignet,
que j’entoure deux fois également. Je remonte vers l’inté-
rieur de la main et entoure le pouce en le ramenant vers
l’extérieur. Dans la salle j’entends que le vieux s’impatiente
mais je n’y peux rien. De la base du poignet je fais
passer la bande entre mon auriculaire et mon annulaire,
enchaîne avec un tour sur la main, puis retourne à
la base du poignet pour remonter entre l’annulaire et le
majeur, et ainsi de suite je fais des X, afi n de bien proté-
ger mes métacarpes, mon scaphoïde, et encore, moi je dis
ça mais je n’y connais rien, je ne fais que répéter ce que
dit le vieux. Après être passé entre le majeur et l’index je
ne fais plus que des tours sur ma main, et là je sens que
mon poing est uni, compact, dur, et que ce n’est plus
l’agrégation de doigts rattachés à une main, avec une
paume au bas de laquelle on trouve un poignet, mais un
seul et unique ensemble, juste un poing qui fait oublier
la main humaine. Rien ne me fait me sentir plus boxeur
que d’avoir les mains bandées.
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date : 10-11-2017
Je viens d'une famille où le sens du service de la France se transmet dès le plus jeune âge, où, depuis des siècles, on compte un militaire à chaque génération. Une famille ancrée dans une terre, celle de Vendée. C'est là que je suis né et que j'ai grandi, à l'ombre des haies bocagères, dans le silence des futaies. Comme chez tous ceux qui ont vécu à la campagne, le rythme des saisons a été celui de ma jeunesse ; se réjouir de débusquer les champignons dans l'humidité de l'automne, jouer sur la glace, observer le réveil de la flore au printemps, respirer le parfum de la terre encore chaude lors des soirées d'été. Cette cadence immuable façonne un homme. Notre époque trépidante nous a malheureusement coupés de cette incarnation du temps, d'un monde rural où la sincérité des relations prime sur les jeux d'apparence et les faux-semblants.
La Vendée c'est aussi une terre où l'histoire compte davantage qu'ailleurs, en tous cas qui porte le souvenir vivace des guerres.
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date : 20-06-2018
Et Aristide Saccard, lui-même, les yeux demi-clos, plongé dans cette béatitude d'un maître de maison qui a conscience d'avoir grisé honnêtement ses convives, ne songeait point à quitter la table; il contemplait, avec une tendresse respectueuse, le baron Gouraud, appesanti, digérant, allongeant sur la nappe blanche sa main droite, une main de vieillard sensuel, courte, épaisse, tachée de plaques violettes et couvertes de poils roux.
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date : 01-10-2018
Mais l’âme de tout cela, l’âme qui emplissait le paysage, c’était la Seine, la rivière vivante ; elle venait de loin, du bord vague et tremblant de l’horizon, elle sortait de là-bas, du rêve, pour couler droit aux enfants, dans sa majesté tranquille, dans son gonflement puissant, qui s’épanouissait, s’élargissait en nappe à leurs pieds, à la pointe de l’île. Les deux ponts qui la coupaient, le pont de Bercy et le pont d’Austerlitz, semblaient des arrêts nécessaires, chargés de la contenir, de l’empêcher de monter jusque dans la chambre. Les petites aimaient la géante, elles s’emplissaient les yeux de sa coulée colossale, de cet éternel flot grondant qui roulait vers elles, comme pour les atteindre, et qu’elles sentaient se fendre et disparaître à droite et à gauche, dans l’inconnu, avec une douceur de titan dompté. Par les beaux jours, par les matinées de ciel bleu, elles se trouvaient ravies des belles robes de la Seine ; c’étaient des robes changeantes qui passaient du bleu au vert, avec mille teintes d’une délicatesse infinie ; on aurait dit de la soie mouchetée de flammes blanches, avec des ruches de satin ; et les bateaux qui s’abritaient aux deux rives la bordaient d’un ruban de velours noir. Au loin, surtout, l’étoffe devenait admirable et précieuse, comme la gaze enchantée d’une tunique de fée ; après la bande de satin gros vert, dont l’ombre des ponts serrait la Seine, il y avait des plastrons d’or, des pans d’une étoffe plissée couleur de soleil. Le ciel immense, sur cette eau, ces files basses de maisons, ces verdures des deux parcs, se creusait.
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date : 02-10-2018
À la rentrée des classes, Maxime alla au lycée Bonaparte. C’est le lycée du beau monde, celui que Saccard devait choisir pour son fils. L’enfant, si mou, si léger qu’il fût, avait alors une intelligence très vive ; mais il s’appliqua à tout autre chose qu’aux études classiques. Il fut cependant un élève correct, qui ne descendit jamais dans la bohème des cancres, et qui demeura parmi les petits messieurs convenables et bien mis dont on ne dit rien. Il ne lui resta de sa jeunesse qu’une véritable religion pour la toilette. Paris lui ouvrit les yeux, en fit un beau jeune homme, pincé dans ses vêtements, suivant les modes. Il était le Brummel de sa classe. Il s’y présentait comme dans un salon, chaussé finement, ganté juste, avec des cravates prodigieuses et des chapeaux ineffables. D’ailleurs, ils se trouvaient là une vingtaine, formant une aristocratie, s’offrant à la sortie des havanes dans des porte-cigares à fermoirs d’or, faisant porter leur paquet de livres par un domestique en livrée. Maxime avait déterminé son père à lui acheter un tilbury et un petit cheval noir qui faisaient l’admiration de ses camarades. Il conduisait lui-même, ayant sur le siège de derrière un valet de pied, les bras croisés, qui tenait sur ses genoux le cartable du collégien, un vrai portefeuille de ministre en chagrin marron. Et il fallait voir avec quelle légèreté, quelle science et quelle correction d’allures, il venait en dix minutes de la rue de Rivoli à la rue du Havre, arrêtait net son cheval devant la porte du lycée, jetait la bride au valet, en disant : « Jacques, à quatre heures et demie, n’est-ce pas ? » Les boutiquiers voisins étaient ravis de la bonne grâce de ce blondin qu’ils voyaient régulièrement deux fois par jour arriver et repartir dans sa voiture. Au retour, il reconduisait parfois un ami, qu’il mettait à sa porte. Les deux enfants fumaient, regardaient les femmes, éclaboussaient les passants, comme s’ils fussent revenus des courses. Petit monde étonnant, couvée de fats et d’imbéciles, qu’on peut voir chaque jour rue du Havre, correctement habillés, avec leurs vestons de gandins, jouer les hommes riches et blasés, tandis que la bohème du lycée, les vrais écoliers, arrivent criant et se poussant, tapant le pavé avec leurs gros souliers, leurs livres pendus derrière le dos, au bout d’une courroie.
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date : 13-10-2018
Si, jusque-là, la pensée de son mari était passée parfois dans l’inceste, comme une pointe d’horreur voluptueuse, le mari, l’homme lui-même, y entra dès lors avec une brutalité qui tourna ses sensations les plus délicates en douleurs intolérables. Elle qui se plaisait aux raffinements de sa faute et qui rêvait volontiers un coin de paradis surhumain, où les dieux goûtent leurs amours en famille, elle roulait à la débauche vulgaire, au partage de deux hommes. Vainement elle tenta de jouir de l’infamie. Elle avait encore les lèvres chaudes des baisers de Saccard, lorsqu’elle les offrait aux baisers de Maxime. Ses curiosités descendirent au fond de ces voluptés maudites ; elle alla jusqu’à mêler ces deux tendresses, jusqu’à chercher le fils dans les étreintes du père. Et elle sortait plus effarée, plus meurtrie de ce voyage dans l’inconnu du mal, de ces ténèbres ardentes où elle confondait son double amant, avec des terreurs qui donnaient un râle à ses joies.
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date : 29-10-2018
Avant de me déshabiller je rendis encore une fois hommage à Oôn et à toutes les prostituées thaïes. Ce n’etait pas un métier facile qu’elles faisaient, ces filles; il ne devait pas etre si fréquent de tomber sur un brave garçon, doté d’un physique acceptable, et qui ne demandait honnêtement qu’à jouir de concert. Sans meme parler des Japonais - je frissonnai à cette idée, et empoignai mon Guide du Routard. Babette et Léa pensais-je, n’auraient pas été capables d’être des prostituées thaïes; elles n’en étaient pas dignes. Valérie peut-être, il y avait quelque chose chez cette fille, à la fois un peu mère de famille et un peu salope, les deux potentiellement d’ailleurs, jusqu’à présent c’etait surtout une gentille fille, amicale et sérieuse. Intelligente aussi. Décidément j’aimais bien Valérie.
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date : 07-03-2019
Mon cher frère, rends-toi compte, notre enfance et notre jeunesse à ReykjavÍk, la vie dans la rue, les rires dans l’appartement d’à côté, les enfants qui jouaient sur le trottoir, le chat qui ronronne agréablement sur les genoux d’une vieille femme, la lessive qui flotte au vent, étendue sur une corde à linge dans une arrière-cour rue Vesturgata, toutes les choses qui existaient et qui emplissaient le monde, tout ce qui constituait le monde, à aujourd’hui entièrement disparu. Tout ça est effacé. Tous ces bruits se sont tus.
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L'union européenne en est venue à théoriser non seulement sa volonté d'impuissance, mais également la désincarnation des acteurs de la « gouvernance ». On peut nommer à la tête de la Commission n'importe quel ivrogne, cela n'a plus d'importance.
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Et le second bouleversement, qui met fin à la frontière anthropologique, c'est à dire entre les sexes, au nom de la théorie du genre, la frontière entre l'animal et l'Homme, quand l'embryon devient un objet d'expérimentation et que l'animal devient un sujet de droit, et enfin la frontière entre le robot et l'Homme, avec l'avènement du transhumanisme.
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La métaphysique la plus ingénieuse ne justifie pas l’homme qui a déchiré le coeur qui l’aimait.
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date : 21-10-2019
-Comment ça va entre toi et Francesca, au fait? dit Benjamin qui lui enviait naguère cette épouse riche et belle mais qui n’enviait plus rien à personne aujourd’hui.
-C’est merdique, répondit Doug, les yeux dans le vague. On fait chambre à part maintenant. Heureusement qu’on en a pas mal, des chambres.
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date : 25-10-2019
Sophie se figea à ces mots et les platitudes toutes prêtes moururent sur ses lèvres. Le silence qui se creusait entre les deux femmes était sans fond désormais. On y était enfin. Au sujet à ne pas aborder, défiant tout dialogue. Au sujet mortifiant, clivant entre tous, parce que l’évoquer c’était se mettre se mettre à nu, déchirer les vêtements de l’autre et être forcé de s’entre-regarder dans cette nudité, sans aucune aucune protection, sans pouvoir détourner les yeux. Quoi qu’elle réponde à Helena - pour peu qu’elle essaye de rendre compte honnêtement se sa divergence -, il lui faudrait fatalement affronter la vérité indicible, à savoir qu’elle-même et ses semblables d’autre part avaient beau vivre côte à côte dans le même pays, elles habitaient pourtant deux univers différents, séparés par une cloison étanche, une muraille formidable faite de peur et de suspicion, voire peut-être de ces traits britanniques par excellence, la honte et la gêne.
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Il fallait que je retourne à l’abri. Bien-sûr, je n’avais plus à craindre que ma mère pique une crise ou que mon père me foute une raclée. Je voulais juste éviter que les autres se fassent du souci pour moi, qu’ils pensent que j’étais mort, parce que s’ils le croyaient trop longtemps, je le serais un peu, mort.
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date : 04-11-2019
J’aurais pu lui montrer le carnet, mais je me suis dit qu’il n’aurait rien compris à mon geste. Comment lui expliquer d’ailleurs? Ce geste, je l’avais fait à la manière d’un somnambule, dans un état second, et pourtant c’était un geste précis et spontané, comme si j’avais su d’avance que, derrière le tiroir, il y avait un double fond dans cette table de nuit et qu’on y avait caché quelque chose. Hutte m’avait déclaré que l’une des qualités nécessaires à son métier c'était l’intuition. Et pour comprendre mon geste de ce soir-là, je consulte un dictionnaire en ce moment même. « Intuition : forme de connaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement. »
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Si j’ai perdu ma bande de potes, c’est peut-être par ma faute. Je n’ai pas su les retenir, je les ai laissés s’éloigner, je me suis trop souvent absenté, j’aimais tellement disparaître. En croyant qu’on va manquer aux autres, on se contente de les perdre.
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Maintenant Dea me prend pour son ami. Autrefois l’humour me permettait de m’approcher des filles. Le problème c’est que j’entre trop vite ce qu’on appelle aujourd’hui la « friend zone ». A force de les amuser je deviens leur copain et non leur amant. « Femme qui rit à moitié dans ton lit » est une grosse arnaque. Le vrai dicton devrait être « Femme qui rit, mec pas sexy. »
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Quand, plus tard, j’ai eu l’occasion de rencontrer, au cours de ma vie, dans des couvents par exemple, des incarnations vraiment saintes de la charité active, elles avaient généralement un air allègre, positif, indifférent et brusque de chirurgien pressé, ce visage où ne se lit aucune commisération, aucun attendrissement devant la souffrance humaine, aucune crainte de la heurter, et qui est le visage sans douceur, le visage antipathique et sublime de la vraie bonté.
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...elle avait bien senti que sa place n’était pas là. Ça, c’est une chose qu’elle avait apprise très jeune, savoir où et quand tu es à ta place. Pour une fille, c’est le genre de chose qu’il vaut mieux savoir vite, surtout si ta mère ne s’occupe pas de toi et que tu n’as pas de père...
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Il avait cru en rencontrant Marion que ce serait impossible entre eux, se demandant comment elle pouvait ne pas voir qu’ils n’avaient rien en commun, quand, au contraire, elle semblait heureuse de le trouver si différent, qu’elle avait même insisté en lui envoyant des images d’elle en expliquant, pleine d’espoir, qu’elle était en train de passer un diplôme et qu’elle pourrait travailler dans une imprimerie, alors que lui hésitait à lui parler de la ferme, de La Bassée, se demandant bien comment elle pouvait imaginer y trouver de l’intérêt, oui, très bien, avait-il osé, voyons-nous. Ils s'étaient rencontrés et la première fois elle avait ri - un peu trop, comme si elle avait tenu à le trouver drôle, lui, sachant trop bien qu’il ne l’était pas - et il était resté éberlué qu’elle veuille le revoir, qu’il passe une, puis deux, puis trois, puis quatre, plusieurs soirées en ville, allant après le restaurant jusqu’à partager une soirée au bowling, puis une autre au karaoke, et puis cet écart qu’il avait trouvé entre cette fille dont le dos portait un tatouage qu’il avait fini sinon par oublier du moins par négliger, car les nuits d’amour, quand il la prenait dans ses bras, dans l’obscurité des premières chambres, avaient tout transformé, et la rose meurtrie, les épines métalliques, tout ça, donc, avait fini par s’évanouir avec la lumière. Dans l’obscurité n’étaient restés que la chaleur et la douceur de la peau de Marion, son abandon, ses boucles créoles sur la table de chevet ; cet écart qu’il pressentait, il avait fini par l’oublier totalement ou par décider de ne pas le voir, ne cherchant pas à comprendre, car le plus important et le plus extraordinaire c’était qu’une femme de cette beauté et de cette intelligence s’intéresse à lui, non pas seulement pour une nuit, mais qu’elle lui parle de projet de vie, de mariage - c’est elle qui avait avancé le mot, qui avait osé le prononcer alors qu’il brûlait les lèvres de Patrice depuis des mois.
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