Avocate sous protection

Le soir tombe sur la cité des Acacias, un quartier de la banlieue parisienne. La nuit vient obscurcir les murs gris de son immeuble. Nous sommes au mois de juillet, l’air est étouffant. Djamila vient de réussir son examen après cinq longues années d’études de droit civil. Elle fait officiellement partie du monde des avocats. Elle devrait être heureuse et fêter sa réussite avec tous ses amis mais l’inconcevable pour elle vient de lui être annoncé. Son désespoir est si intense qu’elle se demande comment elle peut faire pour échapper à son sort. Elle vient d’avoir vingt-trois ans et son père, pendant le repas du soir, lui a annoncé ses prochaines fiançailles avec un homme qu’elle n’a vu qu’une seule fois, il y a plus de dix ans. Ses parents, depuis sa naissance, l’ont promise au fils d’une famille résidant en Algérie. Elle ne peut s’imaginer que son père l’oblige à s’unir à cet homme, âgé de trente-cinq ans, qu’elle n’a pas choisi. Elle ne veut pas encore se marier mais exercer son métier. Pourquoi faire des études si elle en est réduite à changer des couches et à se soumettre à son époux ? Ce soir, son désespoir est si intense qu’elle aurait souhaité n’être jamais née dans une famille dont la façon de vivre dénote que les pratiques ancestrales y sont encore bien ancrées. Son père lui expose tous les côtés positifs de cette union. Son futur mari gagne bien sa vie dans la construction d’immeubles. Elle aura une jolie maison et sera choyée dans sa belle-famille. Mais Djamila a bien compris qu’elle ne sera jamais plus indépendante. Sa déception est immense lorsqu’elle pense à toutes les heures passées, de jour comme de nuit, à étudier, à apprendre les articles de loi. Un travail sans relâche pour en arriver là. Comment ses parents peuvent-ils la priver de se réaliser ? Elle ne comprend plus. Elle s’imagine obligée de rester cloîtrée dans une famille où elle sera surveillée en permanence. Passer ses journées à s’occuper d’une ribambelle d’enfants et à veiller à satisfaire sexuellement son mari. Mais le plus dur pour Djamila sera de supporter d’être à la merci d’un homme qu’elle n’a pas choisi et de ne pas ressentir le désir d’aimer.