Emrys, tome 3 : L'Âge d'argent d'Hyperborée

Les deux adolescents dévisagèrent le ­nouvel arrivant. Leur premier contact avec la langue islandaise les laissait sans voix. Sa sonorité ne ressemblait à rien de connu. Alixe se reprit la première et ouvrit avec fébrilité un guide de l’Islande qu’elle tenait à la main et où elle se souvenait avoir vu quelques mots d’usage ­courant destinés aux touristes.

— Talarðu frönsku ? bredouilla-t-elle avec un accent épouvantable en détachant les s­yllabes. Ég heiti, Alixe.

Le jeune homme brun esquissa un sourire, et lança dans un français parfait :

— Bien évidemment que je parle français ! Et je sais qui tu es, Alixe. C’est moi… Emrys !

Un ange passa. Le souffle coupé, Mattéo et Alixe fixèrent intensément l’adolescent pendant quelques secondes, tandis que celui-ci, pour sa part, souriait à pleines dents.

Alixe fronça les sourcils. Ses yeux parcouraient le visage de son ami à la recherche de traits familiers. Les longs cheveux noirs d’Emrys étaient dorénavant courts et châtains, et son teint hâlé avait fait place à une couleur laiteuse, mais son regard sombre était toujours le même : intense, lumineux, brillant d’intelligence. Les yeux ne pouvaient tromper. C’était effectivement Emrys, avec un autre visage, qui se tenait là, dans l’embrasure de la porte, et les invitait à le suivre.

— Pourquoi… pourquoi as-tu changé d’apparence ? demanda Alixe, ébahie.

Elle se dit alors qu’il était plus beau avec les cheveux noirs et le teint bronzé que châtain au visage pâle ; il lui sourit.

— Imagine la tête de M. Malo et des autres élèves si on me découvrait parmi vous, alors que tout le monde me cherche. Je ne pouvais pas garder le même aspect physique.

— Wow ! T’as fait comment pour nous rejoindre ici ? s’exclama brusquement ­Mattéo, comme s’il venait tout juste de ­réaliser qu’Emrys n’avait pas pris l’avion avec le ­groupe. ­Téléportation, Scotty ?

— Pardon ? fit le jeune Arya en secouant la tête d’incompréhension.