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p.313
MONSIEUR JOURDAIN.- Voilà qui n’est point sot, et ces gens-là se trémoussent bien.
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Lorsque la danse sera mêlée avec la musique, cela fera plus d’effet encore, et vous verrez quelque chose de galant dans le petit ballet que nous avons ajusté pour vous.
MONSIEUR JOURDAIN.- C’est pour tantôt au moins ; et la personne pour qui j’ai fait faire tout cela, me doit faire l’honneur de venir dîner céans.
MAÎTRE À DANSER.- Tout est prêt.
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Au reste, Monsieur, ce n’est pas assez, il faut qu’une personne comme vous, qui êtes magnifique, et qui avez de l’inclination pour les belles choses, ait un concert de musique chez soi tous les mercredis, ou tous les jeudis.
MONSIEUR JOURDAIN.- Est-ce que les gens de qualité en ont ?
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Oui, Monsieur.
MONSIEUR JOURDAIN.- J’en aurai donc. Cela sera-t-il beau ?
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Sans doute. Il vous faudra trois voix, un dessus, une haute-contre, et une basse, qui seront accompagnées d’une basse de viole, d’un théorbe, et d’un clavecin pour les basses continues, avec deux dessus de violon pour jouer les ritornelles.
MONSIEUR JOURDAIN.- Il y faudra mettre aussi une trompette marine. La trompette marine est un instrument qui me plaît, et qui est harmonieux.
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Laissez-nous gouverner les choses.
MONSIEUR JOURDAIN.- Au moins, n’oubliez pas tantôt de m’envoyer des musiciens, pour chanter à table.
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Vous aurez tout ce qu’il vous faut.
MONSIEUR JOURDAIN.- Mais surtout, que le ballet soit beau.
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Vous en serez content, et entre autres choses de certains menuets que vous y verrez.
MONSIEUR JOURDAIN.- Ah les menuets sont ma danse, et je veux que vous me les voyiez danser. Allons, mon maître.
MAÎTRE À DANSER.- Un chapeau, Monsieur, s’il vous plaît. La, la, la ; la, la, la, la, la, la ; la, la, la, bis ; la, la, la ; la, la. En cadence, s’il vous plaît. La, la, la, la. La jambe droite. La, la, la. Ne remuez point tant les épaules. La, la, la, la, la ; la, la, la, la, la. Vos deux bras sont estropiés. La, la, la, la, la. Haussez la tête. Tournez la pointe du pied en dehors. La, la, la. Dressez votre corps.
MONSIEUR JOURDAIN.- Euh ?
MAÎTRE DE MUSIQUE.- Voilà qui est le mieux du monde.
MONSIEUR JOURDAIN.- À propos. Apprenez-moi comme il faut faire une révérence pour saluer une marquise ; j’en aurai besoin tantôt.
MAÎTRE À DANSER.- Une révérence pour saluer une marquise ?
MONSIEUR JOURDAIN.- Oui. une marquise qui s’appelle Dorimène.
MAÎTRE À DANSER.- Donnez-moi la main.
MONSIEUR JOURDAIN.- Non. Vous n’avez qu’à faire, je le retiendrai bien.
MAÎTRE À DANSER.- Si vous voulez la saluer avec beaucoup de respect, il faut faire d’abord une révérence en arrière, puis marcher vers elle avec trois révérences en avant, et à la dernière vous baisser jusqu’à ses genoux.
MONSIEUR JOURDAIN.- Faites un peu ? Bon.
PREMIER LAQUAIS.- Monsieur, voilà votre maître d’armes qui est là.
MONSIEUR JOURDAIN.- Dis-lui qu’il entre ici pour me donner leçon. Je veux que vous me voyiez faire.
Mon fils a le droit d’uriner tranquillement dans les toilettes sans qu’on l’arrose. Je me demande quelle société on construit pour plus tard. salutations."
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.
Jacques Prévert, Paroles
Elle ferma les yeux pour refouler ses larmes, et quand elle les rouvrit, Jonathan n'était plus là.
On éteint tout.
Harry Potter * Ron Weasley * Hermione Granger * Albus Dumbledore * Lord Voldemort * Severus Rogue * Drago Malefoy * Cedric Diggory * Bellatrix Lestrange... et beaucoup d'autres!
Il vaut mieux être chauve qu'avoir une tête de caniche.
-Je préfère avoir une tête de caniche qu'être une vraie chienne.
De nouveau, je vois sʼagiter au-dessus de moi deux mentons. Les deux hommes sont en blouse blanche. Nouvelle tentative pour parler, qui se solde par un gargouillis sourd comme la plainte dʼun grand mammifère
Cʼest cette guerre-là que je nʼai pas connue.
Jʼai quitté mon village de Dordogne le jour de la mobilisation. Mon grand-père a
couvert ma fuite de la maison de famille dans le silence du petit matin, pour éviter dʼinutiles effusions. Jʼai chargé mon paquetage dans la carriole du vieil André. A la cadence du balancement de la croupe de sa jument brune, nous avons pris la direction de Lalinde. Ce nʼest que dans la descente de la gare quʼil sʼest décidé à me dire : “Ne pars pas trop longtemps mon garçon, ça va être une sacrée année pour les cèpes.”
A Lalinde, une dizaine de petits moustachus endimanchés dans leur vareuse se laissaient étreindre par des mères rougeaudes, en larmes. Comme je regardais le vieil André sʼéloigner, un gros joufflu aux yeux comme des billes sʼest approché timidement de moi.
Cʼétait Chabrol, un gars de Clermont-de-Beauregard que je nʼavais pas revu depuis la communale. Il était là, seul, sans famille, sans adieux. Il redoutait de prendre le train pour la première fois, sʼinquiétait des changements. Pour se rassurer, il tirait à petites gorgées sur une gourde accrochée à sa ceinture. Cʼétait un mélange dʼeau- de-vie de prune et de monbazillac. Il en avait trois litres dans son sac, trois litres pour trois semaines de guerre, puisquʼon lui avait dit quʼon leur mettrait la pâtée en trois semaines, aux Allemands. Ce gros communiant qui sentait un drôle de vin de messe sʼinstalla à côté de moi pour ne plus me quitter des yeux.
Pendant un an, nous sommes restés dans cette chambre sans nous en éloigner autrement que pour parcourir le couloir circulaire à petites enjambées timides.
Aucune musique autre que celle de la douleur n’est parvenue jusqu’à nos oreilles.
Nous avons ingurgité sept cent quatre-vingt-cinq bols de soupe mélangée à de la viande hachée, et seul l’éther a pu réveiller notre résigné.
Nous nous sommes parlé le langage du poisson-mouche.
Nous avons croisé quantité de jeunes et jolies femmes qui n’ont connu de nous que nos poses sur le bassin, l’odeur fétide exhalée par les blessures de l’intérieur, les expressions simiesques de nos traits déformés, de ces visages qui rient, déchirés par l’acier, au paroxysme de la souffrance.
Certains s’en sont pris à Dieu de les avoir élus pour témoigner de cette destruction de l’identité, d’autres s’en sont remis à lui pour renflouer leur âme naufragée. Nous avons tous maudit l’Allemand et tous nous avons été convaincus de notre utilité.”
Michaëla, deux mots, on vous vois beaucoup à poil dans le film.
défier l’intruse depuis le fond du néant.
Il ne faut pas grand-chose à un frère possédé pour
hanter sa sœur jusqu’à la fin de ses jours.
mien. Quand on était gosses, il ne me regardait pas de cette
manière. Je ne suffoquais pas sans raison. Il ne gémissait pas
dans son sommeil… C’est à l’adolescence que tout s’est détraqué.
Non. Ça remonte plus loin. À l’enfance… À cause de nos
cousins, Ivan et Maxime : ils étaient frères, mais à couteaux
tirés. Et nous, on avait peur de cette violence. Ils nous semblaient si grands, si terribles…
Viervy, antique station des Alpes, fière de ses neuf
cents mètres d’altitude, se mire dans un lac vert sombre
comme un regard de naïade. Si la vie s’y partage entre les
plaisirs de l’eau (l’été) et ceux de la neige (l’hiver), les
autres saisons y ont aussi leurs attraits. Son mois de mai,
en particulier, est si doux qu’on n’imagine pas que l’on
puisse y mourir. L’on y meurt, cependant, comme ailleurs
et partout… Même s’il arrive que l’âme, une fois séparée du corps, y suive un destin inhabituel.
La pension Le Chardon bleu, avec son minuscule jardin
qui surplombe le lac, n’est pas un de ces hôtels de luxe
où descendent les élégants. Si on lui a accordé ses deux
étoiles, c’est bien à l’ancienneté. Construit dans les années
trente, c’est un chalet de belle taille qui a résisté avec
constance à la modernisation. Son seul charme tient à
cette désuétude qui fleure le vieux bois, le jambon séché,
la tarte aux abricots et le blanc du pays. Les chambres y
sont propres mais spartiates ; la salle à manger est réservée
aux pensionnaires ; et le bar du rez-de-chaussée, hostile
aux touristes, ne réunit que la faune du coin, qui s’accorde le droit d’y boire et d’y fumer ce qui lui plaît.
À défaut de juke-box, on y entend l’accordéon du maître
des lieux, Ernest Pralong, un quinquagénaire barbu, velu,
ventru, que la foudre elle-même ne déracinerait pas. À
longueur de soirée, ses grosses mains tirent de son instrument les musiques les plus insolites : des javas qui font
chalouper un ou deux couples de fortune ; des tyroliennes qu’on reprend en sifflant entre ses doigts ; des valses
musettes qui expédient les filles dans le buffet de sapin ;
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Le Petit cabaret MeP 24/10/08 17:37 Page 13
Je t'appelle partout et je ne sais même pas que je t'appelle.Je t'appelle du fond de moi.
Tu ne peux pas m'entendre.
un ange qui se mourait dans le brouillard.
Un démon s'agenouilla auprès de lui,et lui sourit.
Ça s'est très mal termine.
Il fait ça avec sa respiration. C'est lui qui durcit les os du monde, lui qui lutte contre le voleur de squelettes. En dormant, il empêche le plancher de devenir un marais de sables mouvants. Et mon lit de devenir liquide. Les choses ont des os. Et aussi des racines, loin, au-dehors d'elles, entortillées à l'intérieur des autres. C'est mélangé, quand ça se ramollit à un endroit, ça finit par se ramollir partout. Et moi, je ne fais plus que m'enfoncer dans la bouillie.
Ce soir, le monde tient. Je regarde la raie de lumière sous la porte de la chambre. Je ferme lentement les yeux jusqu'à ce que la lumière ne fasse plus qu'un point, je laisse mes paupières tremblotter et je recommence en réduisant le point le plus possible."
-Et encore vous ne m'avez pas vu avec un Fez!
Les pétales tombaient, coulaient comme des larmes.
Kaitlyn ! Je t’en prie, réponds-moi Par pitié, Kaitlyn. Kaitlyn !
Il y avait comme du désespoir dans cette voix. Quelle voix ? À qui s’adressait-elle ?
_Je n’ai pas pu entrer en contact avec toi jusque-là. Il avait installé Frost à côté de moi, elle me touchait sans arrêt. Elle aurait su. Mais, là, je les ai convaincus que je ne cherchais pas, à te parler… S’il te plaît, Kaitlyn, réponds-moi. C’est Gabriel. Soudain lui parvint une autre vision. Une main ensanglantée, qui gouttait vers le sol. Celle de Gabriel, coupée par l’éclat de cristal, chez Marisol. Elle l’avait vue de ses yeux, elle, Kaitlyn. Elle était Kaitlyn. Elle reprenait son identité.
— Gabriel ?
La voix lui revint, à un volume qui la blessa.
— Oui, Kaitlyn, parle-moi.
— Gabriel, c’est vraiment toi ? Je croyais… que tu serais furax. Après ce que j’ai dit… Elle ne savait plus trop ce qu’elle avait dit. Ni même ce que signifiait « dire ».
— Kaitlyn, ne… oublie ça. Tu vas bien ?
Question absurde. Elle n’avait aucun moyen d’y répondre, du moins en parole, aussi envoya-t-elle à travers la fine toile qui les unissait une vision du néant. Rien, le vide, l’absence…
— Arrête ! Pitié, arrête, Kait ! Qu’est-ce que je peux faire ?
Elle sentait ce puits sans fond qui tentait de l’aspirer et rien ne la retenait plus que cette frêle connexion avec Gabriel, telle une lueur dans un tunnel, qui l’empêchait de devenir folle, mais cela ne durerait pas. Il lui fallait davantage de… de…
— Il faut que tu voies et que tu entendes, dit Gabriel.
— Je ne sais même plus ce que ça veut dire.
Elle sentait l’hystérie monter en elle, avaler toute rationalité.
— Je vais te montrer.
— Je vais te montrer.
Et il se mit à lui donner des éléments, avec son esprit. Des images qu’il avait vues, des sons qu’il avait entendus, des souvenirs. Il lui donna tout.
— Tu te souviens du soleil ? Il est chaud et jaune et tellement brillant que tu ne peux pas le regarder. Comme ça. Tu vois ?
Affamée de sensations, elle avait l’impression que cette voix ne lui parvenait plus par télépathie, car il lui rendait également l’ouïe. Dès qu’elle vit l’image, elle s’en souvint. Le soleil.
— Ça fait du bien.
— C’est comme ça qu’il apparaît en été. J’ai grandi à New York et, parfois, en été, ma mère m’emmenait au bord de l’océan… tu te souviens de l’océan ?
Fraîcheur bleu-vert. Sable chaud sous les pieds, sable qui grattait sous le maillot. Vague mousseuse et bruissante, enfants qui glapissaient. L’odeur et le goût du sel. Kaitlyn buvait avidement ces sensations, affamée de nuances et de bruits.
— Encore, encore, s’il te plaît !
— On se baladait sur la jetée, rien qu’elle et moi. Elle m’achetait toujours un hot dog et une glace. Elle n’avait pas beaucoup d’argent parce que mon vieux buvait mais, parfois, elle arrivait à lui faire cracher un dollar pour lui préparer un bon dîner. Et alors elle m’achetait la glace… tu te rap pelles, la glace ?
Crémeuse, ronde, froide. Collante sur le menton. Le goût puissant du chocolat.
— Je me rappelle. Merci, Gabriel.
Il lui en donna encore. Tous ses plus beaux souvenirs, tous les bonheurs qui lui revenaient à l’esprit, les après-midi dorés, les courses en skateboard, tous ces moments passés avec sa mère quand il avait sept ans et qu’il avait attrapé cette fièvre d’où il avait tiré son pouvoir. Tout ce qu’il était, il le lui donna.
Kaitlyn dévorait ces sensations, s’emplissant de la réalité du monde extérieur. Elle avait soif au soleil et le vent la rafraîchissait, et puis montaient la fumée des feuilles qui brûlaient et le goût des bonbons d’Halloween. Et la musique : elle ne s’était pas rendu compte à quel point Gabriel aimait la musique. A quatorze ans, il voulait jouer dans un groupe ; un soir, alors qu’il improvisait avec le batteur, il l’avait retrouvé à terre, la tête entre les mains. Transpercé par l’esprit de Gabriel. Quand il avait voulu l’aider à se relever, le garçon s’était enfui en courant. Une semaine plus tard, Gabriel entrait dans le Centre de recherche psychique de Durham où sa mère et l’assistante sociale espéraient qu’il apprendrait à se contrôler. Quant à son père, le dernier mot qu’il lui avait adressé avait été : « Monstre ! ».
— Mais peu importe, ajouta Gabriel.
Il ne voulait lui communiquer que de bonnes choses, rien de déprimant. Elle sentit qu’il ne voulait pas lui montrer le visage bouffi de son père et ses yeux chassieux, ni lui faire endurer la violence des coups de ceinture.
— C’est bon, dit-elle. Je ne cherche pas à savoir ce que tu ne veux pas me dire, mais ne t’inquiète pas pour moi, je te jure que je ne le raconterai jamais, je suis désolée. Oh, Gabriel, je suis trop désolée, et…
Elle voulait lui dire qu’elle le comprenait maintenant, comme elle n’avait jamais compris personne. Parce qu’elle était avec lui. Pas comme sur la toile, mais beaucoup plus proche que cela.
Il avait abandonné sa carapace pour lui confier son âme.
— Je t’aime, lui dit-elle.
— Je t’aime, Kaitlyn. Je t’ai toujours aimée.
Elle percevait les souvenirs qu’il avait d’elle, de ses prunelles bleu ardoise aux étranges cercles marine, soulignés de longs cils noirs. De sa peau de pêche. Du crépitement de ses cheveux de flamme quand elle les coiffait, soyeux mais pleins d’électricité.
Elle perçut aussi des bribes de ce qu’il avait pensé d’elle, des formules tirées de leur expérience commune. Ce genre de fille pourrait bien se révéler si intéressante qu’elle aurait vite fait de vous entraîner… Une fille qui le défiait, qui pourrait être son égale… Son esprit peuplé de zones bleues et de météores scintillants… Elle était là, mince et droite, telle une princesse médiévale dans l’aube naissante.
— Et puis j’ai cru que tu m’avais trahi, continua-t-il. En fait, tu étais venue me protéger, c’est ça ?
Alors elle se rendit compte qu’il voyait aussi profondément en elle qu’elle en lui. Elle croyait que lui seul se donnait et qu’elle ne faisait que recevoir… mais, évidemment, il avait dû fusionner totalement pour partager sa vie avec elle. Il savait tout, maintenant.
Jusqu’à ce qu’il aborde un sujet qui l’avait tant secouée.
— Jackal Mac a dit… quoi ?
Elle répéta le souvenir en question :
— Il a dit que tu lui avais conseillé de m’essayer. La froide colère de Gabriel emplit l’univers.
— Je n’ai jamais dit ça. En fait, je ne lui ai jamais parlé de toi.
— Je sais, Gabriel.
— Lydia a vu comment tu m’as donné ton énergie pendant le voyage au Canada. Elle a dû le lui raconter…
— Gabriel, oublie.
Sa colère la blessait, l’emplissant d’images de mort, de Jackal Mac en train de cracher des fragments d’os.
— S’il te plaît, raconte-moi des choses agréables.
Il accepta et, toute la nuit, évoqua pour elle de belles musiques, des collines fleuries, l’odeur des crayons taillés, le goût des marshmallows. Et le contact de ses mains, ce qu’elle ressentirait si jamais elle revenait au monde.
-Il existe une autre façon?