La Coiffeuse de Dieu, Tome 1

Dès qu’elle fut en âge de travailler, vers douze ans, lui fut assigné l’entretien du jardin du couvent, une roseraie dont le centre était orné d’une magnifique statue de la Sainte Vierge.

Ses travaux de jardinage accomplis, Gabrielle ne manquait jamais de se recueillir de longues minutes devant cette statue bleue, blanche, or et rose, où l’on voyait la mère de Jésus se pencher vers on ne sait quoi au juste, un enfant peut-être, un fidèle, un malheureux.

La jeune femme avait très tôt commencé à faire quelque chose de fort particulier, qui ne tarda pas à attirer l’attention des religieuses.

En effet, elle parlait à la statue, comme elle aurait parlé à sa mère, qu’elle n’avait jamais connue, et ça lui avait toujours laissé une nostalgie, une sorte de détresse, un sentiment d’abandon, car la première et la plus importante personne de sa vie lui avait dit non.

Au début, les autres sœurs crurent que la belle et jeune Gabrielle était un peu bizarre, si ce n’est carrément folle. Car non seulement conversait-elle avec la statue, mais souvent elle riait, avait parfois des fous rires.

Intriguées par ces « conversations », des sœurs se risquèrent à poser à Gabrielle des questions, puis à lui demander conseil pour la conduite de leur vie ou leur cheminement spirituel.

La jeune femme avait des réponses dont la sagesse étonnait, surtout vu son âge. Quand on la louangeait, elle arguait, avec l’humilité la plus parfaite, qu’elle se contentait de répéter ce que Mère (c’est ainsi qu’elle appelait la Sainte Vierge) lui avait murmuré à l’oreille.