Les Chroniques du mensonge, Tome 2 : Arthur Quinn et le loup de fenris

Il bondit à l’étage, montant les marches deux par deux, et alla dans sa chambre. Sa lampe de bureau était toujours allumée — une mauvaise habitude pour laquelle Joe le grondait toujours —, mais il l’éteignit, plongeant la pièce dans l’obscurité. Au bout de quelques secondes, ses yeux s’habituèrent à l’obscurité, légèrement éclaircie par la lueur ambrée des lampadaires qui pénétrait la pénombre de la chambre.

Il s’agenouilla et tendit le bras sous son lit pour en sortir le marteau. La tête du marteau était forgée dans un fer sombre et bosselé, dans lequel étaient gravées des runes. La poignée du marteau faisait la moitié de la largeur de la tête — à peine assez longue pour qu’un adulte puisse la prendre dans sa main. L’outil dans son ensemble avait l’air très lourd, et Arthur savait au bruit sourd qu’il faisait contre le sol que, s’il le faisait tomber ou le lançait, c’était un véritable poids mort. Pourtant, il ne fut pas lourd lorsqu’il le souleva. Au contraire, quand il le prenait ainsi, il avait l’impression que le marteau complétait son bras, qu’il était à sa place.

Peu après l’incident avec Loki, il avait demandé aux Vikings ce que c’était et ce qu’il représentait. Tout ce qu’il avait réussi à comprendre de cette conversation unilatérale, c’était que le marteau était très puissant et qu’aucun des soldats n’en voulait. Il était à lui maintenant, lui avaient-ils indiqué. Il se dit qu’il essaierait de leur redemander bientôt la spécificité de cet étrange objet.

Il posa le marteau sur son bureau. Puis il sortit le pendentif de sa poche et le posa à côté. Il s’assit et regarda le monde silencieux au-dehors. Il voyait la maison d’Ash à l’autre bout de la rue. Toutes les lumières étaient éteintes ; tout le monde était au lit, en train de dormir. Il se dit que certains devaient dormir plus paisiblement que d’autres. Une douce lueur mandarine tremblait dans le salon — les dernières braises de la cheminée qui se consumaient, sans doute. Toutes les autres maisons de la rue étaient aussi tranquilles. Çà et là, une lumière était encore allumée, mais rien ni personne ne bougeait. Le tertre recouvert d’herbe au centre du lotisse-ment — l’espace vert — était désormais blanc, recouvert d’une croûte de gel qui ne faisait qu’augmenter au fil des heures. Les arbres avaient perdu leurs feuilles depuis longtemps, et les voitures étaient sans vie. Et, pendant tout ce temps, Arthur observait.

Il resta à son bureau, à regarder passer la nuit. Si Loki se montrait, il le saurait. Il se levait toutes les heures et marchait dans sa chambre pour se dégourdir les jambes. À un moment, une lumière vacilla dans la maison des Barry. Il ne connaissait pas le plan de leur maison par cœur, mais il se dit que ce devait être dans la chambre de Max. Quelques instants plus tard, la fenêtre fut de nouveau plongée dans le noir. Les cauchemars sont revenus, pensa-t-il tristement.

Le seul mouvement de toute la nuit arriva juste après 4 h du matin, lorsqu’un jeune couple de l’autre côté du lotissement quitta sa maison en tirant ses valises. Ils partaient certainement pour un climat plus chaud par un vol très tôt. Arthur ne put s’empêcher d’être jaloux. Ils avaient l’air si heureux de partir — fatigués, mais heureux. Ils n’avaient certainement pas les mêmes inquiétudes que lui.