Comment va la nuit ?

Après son opération, Anthony retourne chez lui, dans son refuge, une ancienne bergerie à la montagne. Les jours passent et il ne guérit pas, bien au contraire. Son état empire et il sait que c'est la fin. Anthony sort dans la nuit noire et s'écroule dans la neige.

C’est le début de roman mais l’épilogue. On démarre donc la lecture de ce roman par la fin et on remonte le temps jusqu’au début .

3 livres : du livre 3 au livre 1, à lire dans cet ordre avec pour chacun d’eux un titre.

Le livre 3 : « Gloria » raconte les liens que Anthony va tisser avec sa jeune voisine. Ils se confient l’un à l’autre, surtout Gloria dont histoire ravive chez Anthony celle d’une cliente assassinée par son ex qui la harcelait, alors qu’il était son avocat. Les chapitres au sein de ce « livre » ne sont pas numérotés. Une simple page blanche les sépare. On comprend qu’Anthony est un taiseux. Il a été violent, alcoolique et nomade avant de finir là où on le trouve au début.

Le livre 2 : « Katel » est consacré à l’amour de jeunesse d’Anthony et couvre la période de l’enfance à l’âge adulte avec des retrouvailles impossibles avec elle, entre le moment où il devient un avocat, qu’il croit à la force des mots comme le lui a appris sa maman qui vient de choisir l’euthanasie et qu’il accompagne dans son projet et au moment où il quitte sa vie de citadin urbain et s’arrête dans ce village perdu des Alpes. Entre temps, il aura bougé comme pour se chercher. Il se sera détruit à coup de désœuvrements alcooliques. Il aura abandonné la force des mots par celle des poings avec beaucoup de cicatrices tant physiques que morales. Mais cette violence et cette descente aux enfers est évoquée par petites touches tout au long du roman.

Le livre 1 : « Maman » est consacré à sa maman vivante, jeune, à l’absence de son père, à Anthony enfant et adolescent. Les chapitres sont non seulement numérotés mais chacun a un titre et on suit l’évolution d’Anthony et ses relations fortes et authentiques avec sa mère, joviale, positive et aimante avant tout et son premier amour Katel qui lui cout un plaid tel un patchwork avec des compartiments pour ses « petits démons » et un avec « Comment va la nuit ? » que lui a dit si souvent Katel et qu’elle tire d’une pièce de Shakespeare.

Et puis, il y a ce prologue qui s’illumine comme la clarté du jour.

Dans ce livre c’est l’histoire d’Anthony avec les femmes de sa vie qui ont compté pour lui, qui l’ont façonné et tous ces événements qui l’ont marqué, créé en lui des traumatismes qui se voient autant que ses cicatrices. Donc on remonte le temps au gré des « livres » qui chacun zoome sur une partie de sa vie n’évoquant qu’à demi-mots cette partie sombre en lui qu’ont été l’alcoolisme, la violence physique et le nomadisme. On remonte avec lui le fil de sa vie en le suivant de très près car impossible pour lui le lapin, l’ours, le loup d’en être le narrateur. On découvre sa vie d’avant qu’il existe jusqu’à la fin avec ces événements, ses douleurs, ses traumatismes qui l’ont façonné et ont fait de lui cet homme solitaire qui se méfie des autres comme les autres de lui, à part peut-être les femmes qu’il respecte et à qui il peut se confier par bribes comme si c’était sa mère ou encore sa grand-mère …

A fur et à mesure de l’avancée dans le roman donc dans son histoire, on ne recule pas mais on reconstitue l’histoire d’Anthony de sa conception au « prologue » car là aussi, c’est une sacrée surprise.

Un livre déroutant par sa construction qui renverse la chronologie mais par la justesse des propos campe bien l’univers de cet homme en remontant à l’origine de son mal et de sa relation unique et fusionnelle avec sa mère : celle-ci expliquant certainement cela.

Encore un auteur dont je vais lire d’autres livres.

Un livre à avoir dans sa bibliothèque... sacrément bien foutu et au bout du compte une belle histoire d'amour(s) qui peut exister quand l'homme se décide à répondre à "Comment va la nuit ? " en faisant confiance aux mots qui mettent à nus son histoire et ses sentiment et renvoient ses fantômes se faire foutre....

Dur d'exorciser le passé et davantage les souvenirs.

UN BEAU ROMAN D’AMOUR(S)

Vivre en ermite est un idéal pour certains humains. Est-ce possible au 21e siècle? Anthony en a fait un mode de vie. Il s’est installé dans une bergerie isolée. Sa présence questionne, dans un village où tout le monde se connait et se fréquente. Qui est-il? D’où vient-il? Pourquoi ne fréquente t-il personne, à part sa patronne avec qui il a tissé des liens solides? Elle respecte ses silences. Puis, un jour, une jeune infirmière achète la ferme voisine. La vie d’Anthony en est bouleversée. Cette femme a brisé son isolement et il n’aime pas ça. Que va-t-il faire? La routine de sa vie sera t-elle perturbée? Tout le village retient son souffle. Caroline, sa patronne, s’amuse. Elle le connaît bien. Du moins, c’est ce qu’elle pense. Est-ce vrai?

Par un flash back, nous entrons dans la vie d’Anthony. Une vie riche en événements. Une vie de douleurs, de renoncement et de souffrances muettes. Le récit se fait en toute simplicité. En toute réserve. Comme la vie d’Anthony. Nous ressentons ses émotions les plus intimes. Ses pertes. Ses silences bruyants. Sa détresse. Sa force. Ses faiblesses. Nous l’accompagnons dans son errance. À la recherche d’un je-ne-sais-quoi inqualifiable. Subrepticement, nous nous glissons dans sa peau. Dans sa vie. Dans ses rudes silences. Comme une âme en peine. Trouvera t-il ce qu’il recherche? Soignera t-il ses blessures?

L’auteur nous glisse doucement dans la vie, dans la peau d’Anthony. Dans ses blessures. Dans ses secrets. Dans ses questionnements. Dans son errance. Cet homme, blessé par la vie, est à la recherche de la paix de sa conscience. Il recherche une rédemption. Ne vaut-il pas mieux qu’il se pardonne d’abord? Qu’est-ce qui a pu briser cet homme? Que recherche t-il? Combien de blessures doit-il soigner? Que cache son silence? Le roman commence par la fin. Peu à peu, nous nous introduisons dans sa vie. Nous remontons le cours de son existence. Nous allons à la rencontre de cet Anthony que lui-même ignore. Cet homme d’une grande sensibilité. Que recherche t-il à travers ses actions? C’est un roman émouvant. Touchant. Tout en pudeur retenue. C’est un roman qui laisse son empreinte dans le cœur du lecteur.

Je me suis laisser séduire par ce roman. Et j'avoue ne pas avoir été déçus. Malgré une chronologie inversé, par si inversée que ça en réalité, le plongeon dans le passé des personnages, que l'on découvre petit à petit au fur et à mesure de l'histoire est totalement bouleversante, et nous apprends à tous les aimer (ou presque), surtout maman. J'ai réaliser à la fin de ma lecture que les sous chapitres était fait de manière pas tout à fait normal je m'explique Spoiler(cliquez pour révéler)les troisièmes chapitres (donc le premier que l'on lis) ne comporte pas de titre de sous chapitre juste des saut de page. Le deuxième comporte juste un numéro. Et le premier comporte un titre en plus du numéro. On peut y voir (personnellement c'est ce que j'ai compris), "une descente dans les enfers" de l'esprit d'Anthony, son âme ce trouble petit à petit jusqu'à ce soir là avec Victoria quand je m'en suis rendus compte j'ai été étonné, et ça m'a encore plus plonger dans le récit (même si c'était presque la fin). J'ai été agréablement surpris de ma lecture malgré un certain ennui au début du récit

Je me suis laissée séduire par ce roman en raison de la promesse d’une construction « à la chronologie inversée ». Pour qu’elle soit ainsi mise en avant, je me suis dit que cette construction devait beaucoup se démarquer de ce qui se fait habituellement. Eh bien, je dois avouer que ce point-là m’a quelque peu déçue, et me semble largement survendu : certes, le récit ne se déroule pas dans l’ordre chronologique, mais le procédé utilisé n’est pas particulièrement original. Un prologue (intitulé « épilogue », pour bien faire écho à la promesse de la quatrième de couverture) qui dévoile grosso modo la fin du roman. Trois parties qui remontent le temps petit à petit, à trois époques distinctes, mais écrites chacune dans l’ordre chronologique (c’est là que se trouve la supercherie par rapport à ce qu’annonce la quatrième de couverture, je trouve !), et un épilogue (intitulé « prologue », comme on pouvait s’y attendre), qui vient clôturer le récit et n’a à mon avis rien d’un prologue et plutôt tout d’un épilogue.

Mais passons.

Parce que malgré cette déception par rapport à l’argument qui m’a initialement décidée à ouvrir le livre, j’ai adoré ma lecture. Et je me rends compte que mes coups de cœur procèdent tous du même ressort : mon attachement aux personnages et l’intensité des émotions que je ressens en découvrant leur histoire.

Car oui, j’ai aimé les personnages. Avec leurs nombreux défauts, leurs multiples et lourdes blessures… Leur façon d’être humains. Juste humains. Profondément humains. Anthony, Victoria, Suzon, Tonton Marc, Katel… Et surtout, surtout : Maman. Je crois que, depuis que je suis moi-même devenue mère, aucun personnage de mère ni aucune relation mère-enfant ne m’ont autant émue et remuée dans un roman que dans Comment va la nuit ? La plume sensible et pudique de Christian Carayon, la force sereine de ses mots et de tous les non-dits poignants qui se cachent entre ses lignes, y sont certainement pour beaucoup.

Et au final, la construction, si elle n’a rien d’exceptionnel (à mes yeux du moins), me semble parfaitement naturelle et au service du récit : le roman s’ouvre sur une scène où Anthony se trouve au seuil de la mort, qui éveille une curiosité légitime à comprendre comment il en est arrivé là. Toute la suite du livre permet de dévoiler petit à petit son cheminement, les divers événements clés de sa vie, et les bascules qu’ils ont tour à tour déclenchées. De manière magistrale.

Chronique complète et courts extraits sur mon blog : https://catherinephanvan.fr/chronique/noir/2023/08/22/christian-carayon-comment-va-la-nuit.html

Un roman introspectif où il s'agit de remonter le temps, de rencontre en rencontre, d'épisode en épisode. Tout ce qui a compté pour Atnhony Malo nous est livré sans fioriture par un homme dont on sait dès le début qu'il est en train de mourir, seul dans le froid et la neige. L'histoire d'une vie d'homme du crépuscule à l'aube pour un roman intime nous offrant une profonde compréhension du monde intérieur et des motivations de son personnage principal. Heureusement la vie d'Anthony est peuplée des femmes qui ont eu pour lui une importance capitale. Sa mère en premier lieu, un portrait magnifique d'amour inconditionnel. Les femmes qui auront traversé sa vie Caroline, Jeanne, Katel et enfin Victoria. L'amour toujours au centre du métier, la peur, les cicatrices, la violence et cet homme que l'on connaîtra enfant, adolescent, jeune avocat et ermite quinquagénaire. J'ai adoré cet ours taiseux qu'il est devenu car on comprend le cheminement des événements qui l'ont conduit à sa bergerie perchée dans la montagne. Une plume qui sait manier aussi bien la tendresse que la violence, les non-dits, la solitude et les regrets. Un éclairage sans concession du monde et des petites et grandes mochetés que l'on peut y trouver. Mais toujours en ligne de fond l'espoir, la lumière qui n'est jamais bien loin. Un coup de cœur pour ce sixième roman d'un auteur dont je guette toujours les sorties tant ces livres tiennent leurs promesses. Une écriture authentique, taillée au plus près de l'os. Parfois poétique souvent touchante tant on peut se reconnaître dans les facettes de l'âme humaine ainsi dévoilées. La chronologie inversée du roman, originale donne un angle différent, un peu comme ce qui se dit d'une personne en état de mort imminente qui peut voir défiler le film de sa vie avant de mourir. Je vous recommande cette lecture d'un parcours unique qui parlera cependant à tous. Bonne lecture.

http://latelierdelitote.canalblog.com/archives/2023/04/17/39834173.html