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Enfant, j’avais l’impression que tout le monde m’aimait. Les professeurs, les camarades, les voisins, les membres de la famille. Tout le monde m’aimait. Même les animaux domestiques. Les moins domestiques, aussi. Les lézards qui se calaient entre deux pierres à midi, et que j’écrasais parfois et qui ne m’en voulaient pas. On m’aimait. Les cigales chantaient pour moi, quand bien même j’étais entouré par une foule immense (ce qui, soit dit en passant, arrivait rarement dans notre village, le mot foule ne lui correspondant pas vraiment). C’était fort. Un amour global. Certains se sentent persécutés, moi, je me sentais aimé. Bien sûr, ce sentiment relevait de l’illusion, mais, pour un enfant, illusion et réalité sont des pays frontaliers, et passer de l’un à l’autre ne pose aucun problème. Jusqu’au jour où l’on rétablit les contrôles aux frontières.
Il n’écoutait ni le cœur ni les poumons. « Tout vient du ventre ! » était sa devise. Maux de tête, maux d’estomac, otite, angine, grippe… Effervescente al limone ! Le médecin retardait toujours l’arrivée de « al limone ». On avait l’impression qu’il ajoutait au remède un dernier ingrédient, précieux, sans lequel il serait inopérant. Comme le disait mon père, « avec Ignazio, soit on guérit, soit on meurt », la sentence était recevable mais un peu exagérée, quand même.
Maman regarda avec méfiance les quelques feuillets que j’avais griffonnés. Elle remarqua mes tentatives d’illustrations du monstre sur lesquelles il ressemblait davantage à un hippocampe raté qu’à un cachalot. Elle les retourna pour ne plus les voir. On cache la laideur. Et le mensonge qu’on réserve aux enfants lorsqu’ils rentrent de l’école avec un dessin hideux, en leur disant : « C’est magnifique, mon chéri », n’avait plus lieu d’être.
Il y a des gens comme ça qui passent une vie côte à côte alors qu’ils étaient faits pour s’ignorer superbement. Rien ne volait entre eux. Mon père était l’incarnation du calme, dans la Grèce antique il aurait pu postuler pour le titre de dieu de l’introspection. Peu de mots avaient l’occasion de sortir de sa bouche. Et, comme cela durait depuis des années, son idiolecte s’était tellement appauvri que le peu de vocables encore disponible avait perdu la direction de la sortie. De temps à autre, un mot la trouvait, mais il semblait ne pas donner l’information aux autres.
Au bout de la course, longue de dix-huit heures, s’étire le fleuve. À coups redoublés, il lèche les rives charnues, offertes à ses assauts. Il me semble que c’est moi que je regarde. Moi retournée comme un gant, le paysage à l’intérieur de moi, déployé à perte de vue. Voici l’influx qui traverse ma chair et m’entraîne là où peut s’accomplir ma jouissance. Je le contemple. Il court sous ma peau.
François éteint le réveil, dégage les couvertures, saute illico du lit. Il tend le bras vers la chaise, enfile en grelottant son pull, son jean, boucle sa ceinture, lace ses chaussures dans les carrés de lumière que le réverbère couche au plancher. Ça caille sec, il s’en fout, à l’intérieur il brûle du corps de Nine surgi en rêve, la bouche de Nine dans sa bouche et les cuisses de Nine verrouillées à ses reins, elles pèsent encore. Face au miroir il lèche sa paume, aplatit un épi. Six litres de sang très rouge irriguent parfaitement son corps de vingt-deux ans, pulsent à travers cent mille kilomètres de vaisseaux. Il gratte aux carreaux des dentelles de glace, déclinaisons de l’hiver sibérien qui sévit à Paris comme dans toute l’Europe, les laisse fondre sur sa langue.
Il arrive qu’ils se lèvent, marchent, et oublient, ce qu’ils ont déjà subi comme ce qui va advenir, oublient d’être raisonnables, cessent d’écouter leurs corps ou plutôt, modifient soudain l’écoute qu’ils lui prêtent, le paysage alors les ronge sans douleur, juste une main ferme qui leur serre le cœur, la sensation déjà lointaine de l’archet contre le violon.
Dans ces moments-là, ils ne sont plus des conquérants, même plus des explorateurs. Leur viennent des mots inattendus, émerveillés, pour d'écrire ce qui les entoure.
L’abri, c’est simple : y a trois murs, un toit et un banc sur une dalle de béton. Le toit c’est
contre la pluie, les murs c’est contre le vent et la dalle c’est contre la boue. Fonctionnel. Pour
la vie. Pas besoin de plus. Un abri, une grosse capuche, du bon pilon, et c’est parti pour
durer. Me manquerait plus que la musique pour frôler le paradis et rester même la nuit.
Ils prennent la pose, père et fille, sur le pont du grand paquebot qui vient d’accoster. Tout autour d’eux, une agitation fébrile. On rassemble sacs, ballots, valises. Toutes les vies empaquetées dans si peu.
Eux deux restent immobiles, face au photographe. Comme si rien de tout cela ne les concernait.
J’ai compris très tôt que mon père ne serait jamais un vrai Français, un de ces types convaincus que l’Angleterre a toujours été un lieu de perdition et le reste du monde une lointaine banlieue qui manque d’éducation.
Des fleurs magiques bourdonnaient. Les talus le berçaient. Des bêtes d’une élégance fabuleuse circulaient. Les nuées s’amassaient sur la haute mer faite d’une éternité de chaudes larmes.
Il arrive que des individus prennent des décisions allant à l'encontre de leur intérêt personnel quand ils ont la conviction d'agir pour le bien des autres !
On sème, on récolte, et les deux choses ne sont pas liées. On t'apprend qu'il y a un lien, mais...je ne sais pas, je ne l'ai jamais vu. Parfois on sème, parfois on récolte, c'est tout. Ainsi la sagesse est un rituel inutile et la tristesse un sentiment inexact, toujours.
La tentation de la gloire momentanée peut nous amener à des décisions insensées qui pourront réussir ou non en laissant pour la mémoire une trace de notre vie.
Je suis ici parce que je ne veux pas donner raison à ces porcs, je ne veux pas retourner vivre chez mon père et je n'entends pas renoncer à mes rêves. Je suis ici parce que si j'abandonne cette fois, j'abandonnerai toute ma vie.