Les Portes du néant

Un livre très dur à lire... et d'autant plus indispensable. Samar Yazbek nous emmène clandestinement en Syrie, à la rencontre de sa population qui meurt sous les bombes du régime Assad et fait face aux islamistes de l'EI qui prennent le contrôle du territoire (au moment où les reportages sont réalisés, en 2013). C'est bouleversant.

"Les portes du néant" de Samar Yazbek (306p)

Ed. Stock

Bonjour les fous de lectures....

Voici le récit d'une journaliste alaouite qui a quitté la Syrie en 2011 pour être réfugiée politique à Paris.

Ce livre est le témoignage de ses trois retours "chez elle" sous les bombes entre 2012 et 2013.

Vive opposante au régime de Bachar al- Assad, elle a participé au printemps arabe et a fait de la prison en voulant défendre la liberté de son pays.

Par trois fois, clandestinement, au mépris du danger, elle va passer la frontière turque et retrouver la Syrie.

La Syrie, pays tant aimé, qu'elle retrouve de plus en plus ravagé, anéanti, exsangue.

Trois retour en enfer où elle voit la violence monter crescendo au mépris de la population complètement déboussolée et livrée à elle-même.

Trois retours où à chaque fois partir est de plus en plus dur, où à chaque fois, elle se dit qu'elle reviendra...

Elle veut témoigner pour tous ces civils qui subissent la folie du tyran et de ses alliés.

Témoigner pour tous ces combattants de l'opposition.

Témoigner pour tous ces hommes qui espèrent encore retrouver un pays libre

Témoigner pour ces femmes qui continuent à maintenir la famille debout.

Témoigner pour ces enfants souffrant de l'absurdité des adultes et qui continent à sourire et avoir dans leurs yeux des paillettes d'espoir.

Et surtout témoigner pour que le reste du monde civilisé se rende compte de cette tragédie où il y a tant d'enjeux politiques et économiques que personne ne bouge et éviter qu'il tombe dans l'oubli.

Un récit au coeur de l'horreur, de l'insoutenable à lire absolument pour mieux comprendre.

C'est bouleversant mais indispensable.

Courageuse, émouvante, les mots me manquent pour exprimer ce que je ressens à l’égard de Samar Yazbek qui, par trois fois entre 2012 et 2013, a ouvert « les portes du néant » pour enquêter sur ce qui se passe en Syrie au plus près du terrain. Elle en a rapporté un livre-témoignage bouleversant sur cette tragédie qui continue à se dérouler à l’instant même où j’écris ces quelques lignes. Aux actualités de ce jour : 72 morts suite à une attaque chimique du régime donnant lieu à une réaction musclée des Etats-Unis … L’Occident va-t-il enfin se réveiller et aider le peuple syrien ? Car « La Syrie n’a pas beaucoup de pétrole. Alors le prix des morts a moins de valeur pour l’Occident. Ils laissent faire … «...« Tout ce qui se produisait avait été planifié loin de la Syrie, avec peu de considération pour nos idéaux ». Terrible constat...

Récompensée pour son précédent ouvrage « Feux croisés, journal de la révolution syrienne » par plusieurs prix littéraires défendant la liberté d’expression, Samar Yazbek est réfugiée en France depuis 2011, en exil après avoir connu la prison et des tortures dans les geôles de Bachar Al-Assad. Elle appartient à la communauté alaouite, celle du président Bachar Al-Assad (une branche dissidente de l’islam chiite qui réunit 12% de la population syrienne). Communauté honnie par tous les combattants syriens, elle prend donc d’énormes risques à aller à la rencontre de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes, victimes d’exactions de tout genre qui tentent de survivre au milieu des ruines. Elle les écoute et recueille leurs confidences. Depuis son exil, elle n’a cessé de dénoncer le pouvoir syrien. Elle entend se présenter comme une Syrienne qui a pris le risque de s’engager comme tant d’autres. « J’étais obsédée par l’idée d’enregistrer les témoignages de tous les syriens, prisonniers, militants, combattants. Je voulais être la narratrice de ce récit. Je faisais partie du fragile fil de la vérité qui avait été obscurci par l'histoire ». Samar Yazbek a flirté avec la mort afin de rapporter au reste du monde un témoignage poignant de réalisme et de sincérité. « La Syrie ne sera plus jamais la même. On l’a pendue et écartelée ».

Difficile de rester insensible au drame que vivent les Syriens car il faut savoir qu’en 6 années de guerre, la Syrie a perdu un quart de sa population. Plus de 5 millions de personnes ont fui le pays, provoquant la plus grave crise humanitaire depuis 1945. Et près d’un quart de ces réfugiés sont des mineurs.

Ce livre me rappelle « la fin de l’homme rouge » de Svetlana Alexievitch (Prix Nobel de Littérature 2015) par les horreurs commises par le régime en place sur son peuple.

Ce livre est un cri, un hurlement qu’il nous faut impérativement entendre pour agir …

Tout le monde sait ce qui se passe en Syrie actuellement. Mais ce livre magnifique nous éclaire sur le début de la révolution et surtout sur l'envahissement du pays par les groupes extrémistes . Un livre qui parle de la guerre, de ces hommes et ces femmes qui ne souhaitaient que la liberté et qui se retrouvent coincés entre le régime de Bachar Al Assad et les extrémistes. Ou comment ces derniers ont utilisé la révolution pour envahir la Syrie et recruter des hommes. C'est un livre vraiment triste, très touchant mais surtout terrifiant. Un livre qu'il faut avoir lu je pense pour véritablement comprendre ce qui se passe là-bas.

La seule chose que je reprocherais à ce livre c'est que le lexique se trouvant à la fin, je ne l'ai pas lu dès le début du livre et du coup j'étais un peu perdu dans les termes représentant les différentes branches de l'Islam et les différents groupes extrémistes. Mais c'est vraiment un livre qui vaut le coup d'être lu.