Comme une blonde fée

Sedela ralentit l’allure de sa monture en arrivant près du lac. A distance, de l’autre côté de l’eau tranquille, elle pouvait voir le château de Windle Court.

La jeune fille ne se lassait pas d’admirer ce bâtiment aux proportions harmonieuses. Les Windle étaient venus s’installer dans la région sous le règne de Henry VIII. Et au cours des siècles, chaque génération avait agrandi le berceau de la famille, jusqu’à ce qu’en 1750, le marquis de Windle — quatrième de ce nom — ait complètement transformé la façade. Deux ailes encadraient maintenant le corps central de ce bâtiment en pierre de taille.

Sedela connaissait Windle Court depuis toujours, mais la même émotion l’étreignait chaque fois qu’elle revoyait le château, le parc, les bois… et jusqu’au temple grec qui s’élevait au bout du lac.

On disait que le marquis était de retour en Angleterre. Il ne tarderait certainement pas à revenir s’installer à Windle Court. Pour de bon ! Pour toujours…

Ivan, l’actuel marquis de Windle, avait neuf ans de plus que Sedela. Cette dernière était encore une enfant quand il était parti faire la guerre sur le continent.

« Je me demande s’il se souviendra de moi », se demanda la jeune fille.

A vrai dire, même étant voisins, ils n’avaient pas eu l’occasion de se voir souvent, car Ivan était déjà au collège quand Sedela se trouvait toujours à la nursery. Mais leurs pères, les meilleurs amis du monde, se retrouvaient tous les après-midi, soit à Windle Court, soit à Four Gables, pour faire une partie d’échecs. Et quand le père d’Ivan était mort, le général Sir Alexander Craven avait eu bien du mal à cacher son chagrin.

On racontait qu’Ivan s’était très bien conduit pendant la guerre. Il avait été décoré en Espagne et avait reçu les félicitations du duc de Wellington après la bataille de Waterloo.

Tout en rassemblant ses rênes, Sedela murmura avec ferveur :

— Grâce au ciel, la guerre est finie !