Les Compagnons des guerriers voxérans, Tome 4 : Son défenseur extraterrestre

— S’il te plaît, murmuré-je. S’il te plaît, ne meurs pas. J’ai besoin que tu restes avec moi. J’ai besoin de toi.

Il ne répond pas, bien sûr. Il ne peut même pas m’entendre.

Je soupire en caressant ses cheveux noirs. J’espère qu’il peut le sentir d’une manière ou d’une autre, même s’il est inconscient. J’espère qu’il peut se dire que quelqu’un veille sur lui, s’occupe de lui pendant qu’il dort. Je fredonne pour lui doucement alors que mes doigts se déplacent dans ses cheveux. C’est une chanson dont je me souviens à peine des paroles, l’une des premières que j’ai chantées quand j’ai commencé à faire des concours de beauté quand j’étais petite. Mais la mélodie est douce et apaisante, et j’espère qu’elle lui apportera un peu de réconfort.

La chanson se termine après un certain temps, et juste au moment où je commence à fredonner une nouvelle chanson, le son hurlant d’un rire dur et guttural s’élève près du feu de camp.

La mélodie meurt dans ma gorge alors que je relève la tête.

Je me mords la lèvre inférieure quand je vois Felg, qui semble avoir dépassé sa tentative de m’agresser et a rejoint le reste des extraterrestres cochons, se moquant et buvant et parlant de tout ce dont les pillards extraterrestres parlent quand ils sont près de conclure un accord. Leurs voix sont trop basses pour que je puisse entendre les mots exacts de leur conversation, mais il continue de me désigner et de faire des gestes très obscènes, alors je peux imaginer ce qu’il dit.

Je serre les mâchoires alors que je me souviens encore une fois de ces quelques moments terrifiants dans les bois où j’étais sûre qu’il était sur le point de m’agresser.

Je me souviens avec une clarté parfaite du regard sur le visage de Kzuri quand il est sorti des arbres en chargeant. Ses traits étaient un masque de rage pure et non filtrée. De haine absolue. Et c’était dirigé vers Felg alors qu’il attaquait l’extraterrestre ressemblant à un cochon.

Kzuri est tellement… intrépide. Tellement protecteur. Il ne semble pas du tout se soucier de sa propre sécurité lorsque la mienne est en jeu. Combien de fois s’est-il lancé dans une bataille pour me sauver la vie, même si les chances étaient contre lui ? Combien de fois recommencera-t-il avant que nous ne nous échappions ou que nous mourions ?

Je n’en ai aucune idée, mais je sais une chose : Kzuri m’a sauvé la vie.

Il l’a fait plus de fois que je ne peux compter, et certainement plus de fois que je ne pourrai jamais rembourser. Ce genre de dévotion, cette loyauté, cette amitié ne ressemblent à rien de ce que je n’ai jamais connu auparavant. La plupart de mes connaissances sur Terre étaient des filles que j’ai rencontrées lors de compétitions, et elles ne comptent guère comme des amitiés. Dans ce cercle, les amitiés ressemblent plus à des alliances, au mieux fragiles et superficielles.

Mais Kzuri n’est pas du tout comme ça. Il n’a aucune raison de continuer à se jeter dans la mêlée, de me sauver de la mort, des agressions ou de quoi que ce soit d’autre. Il le fait quand même. Parce que c’est un homme bien. Parce qu’il est loyal et gentil.

Parce que c’est mon ami, et il pense que je mérite d’être protégée.

Les larmes me montent aux yeux alors que j’en prends conscience. Je me force à ravaler mes sanglots pour que les pillards ne m’entendent pas et ne viennent pas me narguer pendant que Kzuri est inconscient. Mes doigts s’accrochent à un caillot de sang dans ses cheveux, et je l’enlève distraitement alors que je regarde son visage, détendu dans l’inconscience.

Cet homme est clairement disposé à échanger sa vie contre la mienne, sans aucune attente de réciprocité de ma part. Je suis plus petite et beaucoup moins musclée qu’un Voxeran, je n’ai aucune aptitude au combat, et s’il s’agissait d’une bataille contre nos ravisseurs, je ne pourrais pas grand-chose.

Mais je dois essayer.

Je vais le protéger du mieux que je peux. Pas parce qu’il m’a sauvée le premier. Pas parce que je sais qu’il continuera d’essayer de me sauver quoiqu’il arrive. Je dois juste… le faire.

C’est quelque chose que je ressens comme un battement de cœur dans ma poitrine. Aussi immuable que la gravité.

Je mords ma lèvre inférieure, démêlant enfin le nœud de ses cheveux et repoussant les mèches sombres de son visage. Je pose ma main sur sa joue, mes doigts se recourbant maladroitement parce que mes poignets sont toujours liés.

— Quoi qu’il arrive, je te protégerai, murmuré-je. Tu dois juste rester en vie, d’accord ? Juste… survivre, Kzuri. Je le ferai si tu veux. Nous sommes dans le même bateau.

Je ne sais pas s’il peut m’entendre, mais dire les mots soulage quelque chose dans ma poitrine.