De profundis clamavi
Auteur
- L. J. Stranowicz (Écrivain)
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Classement en biblio - 10 lecteurs
extrait
Je picorais dans mon assiette. Seuls les petits bruits nocturnes de la nature et les cliquetis des couverts troublaient le silence. Mon compagnon tenta d’engager la conversation :
— Les Manouches se sont installés sur la clairière près du Parc de la Combe à
la Serpent.
— Les « minorités ethniques non sédentarisées », s’il te plaît. On devait justement faire ramoner la cheminée…
— On n’a pas de cheminée !
— Alors, faire démousser la toiture.
Il sourit et continua en avalant une fourchette de crudités :
— Les habitants du quartier sont déjà inquiets. Où est-ce qu’ils vont aller chercher l’eau et l’électricité ? Tu sais qu’à chaque fois, l’alarme du poulailler du vieux Martin se met à résonner.
— À en croire les avocats qui plaident régulièrement devant moi, « il ne faut pas stigmatiser les populations ».
— Ne traite pas le sujet avec la même légèreté, si tu en parles avec le voisinage ! Ils pourraient très mal le prendre. Ils n’ont pas notre chance, Lazare !
L’insécurité, tu ne connais pas ça, toi, avec la forteresse qu’on a. (J’avais fourni le bâton pour me faire battre.) Mais s’il n’y avait pas ce système de surveillance et tout ça, tu ne serais pas si serein toi non plus…
Je gardai le silence. Peut-être avait-il raison ? Mais ce qui venait d’assombrir mon humeur, c’était plutôt l’évocation de ma maison transformée en bunker,
évocation qui me remémorait la cause de cette protection incontestablement excessive. Loïck sentit qu’il avait été maladroit et posa sa main sur la mienne. Je changeai de conversation. Inutile de nous attarder sur le sujet.
— Tu es donc allé assez loin pour ton jogging ?
— J’ai fait un bon tour, oui. Le Parc de la Combe, la Bergerie, la table d’orientation de Dijon… Mais je n’égalerai jamais tes sorties de deux heures.
— C’est déjà bien.
Il débarrassa les deux assiettes et alla chercher la suite du dîner. Je le resservis en vin et mis, en musique de fond, un vinyle de Creedence Clearwater Revival.
— Pavé de bœuf sauce au poivre, accompagné de tagliatelles ! Ça te convient ?
— Parfait.
— Je me demande comment tu vas faire quand je serai parti en Roumanie pour ce colloque, la semaine prochaine ! Tu vas te goinfrer de plats congelés ou de pizzas ? (Je soulevai un sourcil étonné : je me nourrissais plus sainement que cela !) Tes assises, c’est quand ?
— Justement la semaine prochaine.
— Et ça va durer… ?
— La session dure quinze jours. Quatre affaires. Mais je n’interviens que pour les deux premières.
— Ça te fait quand même deux dossiers de plus à ingurgiter, alors que t’es déjà bien crevé !
Il venait de me donner l’occasion de le taquiner de nouveau. Je le dévisageai, certainement hautain, et lui demandai à quand datait son dernier cours de procédure pénale. Il ne répondit pas, sentant qu’il avait fait une gaffe.
— Un assesseur n’a pas connaissance du dossier avant l’audience, tout comme les jurés. Un œil neuf dans l’affaire. (Il accusa le coup en avalant une gorgée de vin et je lui concédai, en terminant mon verre de thé glacé :) Mais tu as raison, cela ne va sans doute pas me reposer… Je vais devoir écouter attentivement les débats pour me forger mon « intime conviction », alors que je ne suis pas dans un état propice à la concentration. Tiens, ils auraient également dû prévoir ça, dans la Convention Européenne des Droits de l’Homme que tu chéris tant : le droit à un juge en bonnes dispositions physique et morale ! Cela me semble aussi important que l’impartialité, le contradictoire ou l’égalité des armes…
— Ça évite d’ajouter un principe de plus à la liste de ceux que vous bafouez déjà…
Je grimaçai, vexé. Nous étions souvent en désaccord. En tant que théoricien, il pensait que les juridictions se devaient d’appliquer à la lettre les idéaux contenus dans les textes fondamentaux et de ne pas s’en écarter comme il nous arrivait parfois de le faire par nécessité. En tant que praticien, je ne cessais de lui répéter que j’étais d’accord sur le principe, mais que la situation était beaucoup plus compliquée que cela. Il fallait être réaliste et pragmatique.
— Fais pas cette tête ! Ma grande Zaza est tellement au bout du rouleau qu’elle n’a plus aucun humour, maintenant ?
Il avait pris sa voix tendre. Piquante, mais tendre. Cependant, je montai sur mes grands chevaux.
— Rogntudju ! Je t’ai déjà répété de ne pas m’appeler comme ça !
— Du calme ! C’est juste un diminutif
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Une histoire à la fois étrange et captivante !
Malgré le nombre de pages (environ 690), je ne me suis pas ennuyé une seule seconde, bien que le rythme soit parfois un peu lent avec quelques longueurs dans les descriptions. Il y a de nombreux rebondissements avec des moments surprenants et d'autres plus évidents.
Le scénario est plutôt bien construit, tout comme les personnages. L'intrigue avance doucement et est prenante. L'ambiance est sombre avec un humour un peu noir et cinglant. La tension monte crescendo et, une chose est sûre, la morale n'a pas sa place dans cette histoire !
L'univers autour de la magistrature est très intéressant et le fait que Lazare en fasse partie est assez ironique.
La narration est de son point de vue et il faut dire qu'être dans sa tête c'est quelque chose ! C'est un personnage à la psychologie originale et inhabituelle. Il est très particulier, difficile à cerner et se dévoile au lecteur petit à petit dans toute sa complexité.
Je m'attaque de ce pas à la suite et compte bien découvrir d'autres romans de l'auteur !
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Un roman inclassable tout comme l'est son personnage principal. Ah Lazare Estran ! C'est un homme difficile à cerner. Charismatique, mégalo, égocentrique, manipulateur et machiavélique, tant de "doux" adjectifs pour le qualifier dont la liste est loin d'être exhaustive. On se demande pourquoi on l'aime et pourtant c'est le cas, comme un plaisir coupable. Pour une fois, ce n'est pas le héros aux qualités indéniables et à la morale irréprochable.
Et quelque part ça fait du bien. Car Lazare nous renvoie à nos plus bas instincts, nos pulsions et à nos fantasmes... Il y aurait tant à dire sur les (ré)actions de Lazare.
Et lire ce roman du point de vue unique de Lazare rend les choses encore plus immersives. On est dans sa tête mais on n'est pas vraiment seuls dans cette tête, deux personnes en une finalement... Cette dualité à laquelle on assiste par le biais de passages en italique est déstabilisante. On craint/attend le moment où il prendra toute la place pour agir...
Mais non, l'autre est là mais reste très en retrait, simple présence, parfois bruyante sauf à quelques occasions où il prend l'ascendant. Céder à ses pulsions ou se contenir.
J'ai trouvé que c'était tout bonnement jouissif de voir comment ce personnage qui est normalement le chasseur devient la proie, celle d'un corbeau ou d'une harceleuse en herbe et perd peu à peu ses repères et le contrôle de sa vie. Mais il tient bon et ne cède pas à la panique ou à la peur comme toute personne "normale" le ferait. Non chez lui cela suscite plutôt de l'agacement, de la colère de voir ses habitudes bouleversées, ses secrets potentiellement découverts mais surtout d'être le dindon de la farce. Cela n'est pas bon pour son ego et sa mégalomanie ! On le voit s'interroger, douter, soupçonner et se tromper.
Et au final quand on connaît l'identité du corbeau on se dit que c'est un retour de bâton peut être justifié. Le Karma comme dit Suzanne !
Je ne rentrerai pas dans les détails concernant le fameux corbeau pour ne pas spoiler mais je ne m'y attendais absolument pas. Je peux juste dire une chose, foncez ! C'est brillamment écrit, la plume est fluide et les mots défilent sans qu'on s'en aperçoive. Un coup de cœur ! Ravie de pouvoir prolonger le plaisir avec un tome 2.
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Deuxième lecture pour moi. Aprés avoir lu tue-moi plus fort! ca m'a donné envie de me remettre dans la lecture des histoires de lazare.J'aime tellement la psycologie des pesonnages.Je le conseille c'est vraiment original et different de mes lectures habituelles.Vivement le troisième livres....
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Un avis très compliqué à rédiger tant l’histoire de Lazare Estran, juge d’instruction, s’est avérée très sombre, très étrange... mais avant tout captivante !
Comme mentionné ci-dessus, nous suivons le quotidien de Lazare Estran à travers sa narration. Lazare Estran qui est un protagoniste très inhabituel, recelant un côté tantôt touchant tantôt très inquiétant. En tant que lectrice, ancrée dans des ambiances plutôt tendres et mélancoliques, cela m’avait pas mal déroutée quand j’ai découvert l’extrait. Toutefois, l’intrigue et la plume sont parvenues à happer mon attention, à m’encourager à tourner les pages. Alors, bien sûr qu’en acquérant la version finale, je savais sur quel pied danser et honnêtement je ne regrette pas ma lecture pour ces moments de frissons que j’ai ressentis ! En effet, Lazare doit faire face à de nombreuses conséquences liées à ses actes précédents. L’on évoluera alors dans une atmosphère inquiétante, où se mêlent mépris et curiosité. Bien sûr, l’on peut trouver des étincelles d’espoir, notamment dans une certaine relation. Après tout, s’il y a un point que l’histoire met en avant, c’est bien l’aspect neutre qui anime chaque être humain, et cela vaut pour tous les personnages présents dans cette histoire, avec Lazare en tête qui a su me marquer de par sa psychologie à double visage et, sans aucune exagération, parfaitement maîtrisée !
Conclusion : une histoire mystérieuse que j’ai réussi à apprécier grâce à son protagoniste qui sort de l’ordinaire et à la plume de l’auteur que je trouve incroyablement percutante !
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Date de sortie
De profundis clamavi
- France : 2020-10-26 (Français)
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Résumé
Lazare Estran a tout pour être heureux : un physique avantageux, un travail passionnant, un concubin charmant, une magnifique maison où tout est parfaitement ordonné…
Juge d’instruction, c’est un magistrat compétent et respecté. L’image même de l’homme qui a su trouver sa place dans la société. Mais cet équilibre apparent est mis à mal lorsque commencent à arriver des lettres anonymes. Les contrariétés s’enchaînent, remuant le passé, rouvrant les blessures, ébranlant la petite vie tranquille et bien rangée qu’il s’est construite, ainsi que la façade angélique derrière laquelle il tente de contenir ses démons… Le corbeau sait-il réellement à qui il a affaire ?
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