Les Vestiges du jour

Dans ce livre, il ne faut assurément pas chercher de l'aventure, des passions torrides ou autres. Le plus gros de la narration se présente sous la forme de l'introspection de Stevens, majordome d'une grande maison, qui repense à son passé dans cette maison, et ce qu'est être un grand majordome. Il y a donc différentes scènes intervenues à différentes époques de sa carrière, avec des anecdotes, comment il a côtoyé l'Histoire auprès de personnages puissants qui sont passés par là, etc. Mais d'abord, il faut lire avec une certaine finesse entre les lignes, car le majordome revêt un personnage tant qu'il est en public, laissant sa personnalité authentique de côté. Jusqu'où un majordome est-il prêt à revêtir ce personnage lisse, quelles occasions peut-il manquer ce faisant au cours de sa vie ? C'est là que se trouve toute l'âme du roman. Spoiler(cliquez pour révéler)Ainsi, son père, également majordome, l'a totalement négligé, et ne l'a compris que sur son lit de mort, lui-même s'est fait acteur de discrimination contre les Juifs sans états d'âme, il n'avait aucune vie personnelle en dehors de son travail, et a été jusqu'à être totalement aveugle à l'amour que lui portait Miss Kenton malgré des appels du pied de plus en plus appuyés jusqu'au moment où elle s'est mariée avec un autre

Ce n'est pas exactement le genre qui me passionne, avec une lecture parfois un peu laborieuse, mais le message sous-jacent a éveillé en moi une certaine forme de compassion, d'autant plus qu'on approchait de la fin.

Je suis très mitigée par cette lecture, qui reste toutefois une bonne découverte. Il est difficile de le juger tant il est bien écrit, mais j'ai pourtant trouvé que certaines longueurs détournaient mon attention de la belle plume et de la réflexion du protagoniste insolite qui nous est présenté.

Comme j'aime Mr Stevens et la grande nostalgie qui se dégage de l'histoire de sa vie et des souvenirs de sa carrière de majordome de Darlington Hall !

Kazuo Ishiguro parvient à nous plonger, sans en avoir l'air, dans un récit très dense, abordant des thèmes variés et universels.

L'histoire commence assez simplement. Mr Stevens, majordome de Mr Farraday, le nouveau propriétaire de Darlington Hall, rencontre certains problèmes de personnel et décide de profiter du congé que lui octroie son employeur pour reprendre contact avec l'ancienne intendante du domaine, Miss Kenton (devenue entretemps Mrs Benn). Cette dernière a, en effet, quitté son mari et semble prête à reprendre du service. Mr Stevens se met donc en route vers les Cornouailles et profite du voyage en voiture pour se remémorer les grands moments de sa carrière. Et quels grands moments !

Car à l'époque dont Mr Stevens nous parle, Darlington Hall était encore une grande maison, et Lord Darlington un grand monsieur. Durant l'entre-deux-guerres, ce noble idéaliste qui ne se souvenait que trop bien de la Première Guerre mondiale s'est apparemment démené pour empêcher la survenance du second conflit mondial. Mais malheureusement pour lui, Lord Darlington s'est laissé influencer par les Allemands et leur propagande, ce qui provoquera sa chute.

En tant que majordome de Darlington Hall, Stevens a assisté à de nombreuses (et importantes) réunions entre les membres de la noblesse anglaise et les hommes politiques. Et cela a eu une influence sur sa personnalité, car l'homme est parfois un peu snob.

Stevens fait aussi preuve d'une grande abnégation : le service passe avant tout et rien ne doit venir le perturber. L'efficacité discrète de Stevens est absolument remarquable même si, à la fin du roman, il semble la remettre lui-même en question, s'interrogeant sur ce que sa vie a été, se demandant si cela en valait la peine. Car la rencontre avec Miss Kenton semble provoquer une prise de conscience chez Stevens et le pousser à questionner ses choix.

Au fil des pages et des souvenirs évoqués, c'est un homme profondément attachant qui se révèle à nous. Un véritable butler anglais, au flegme imperturbable. Mais qui cache une grande sensibilité et un cœur brisé.

Sans doute un des romans le mieux écrit et le plus intelligent que j'ai pu lire.

Il est très difficile, par un résumé ou commentaire, de rendre justice au sujet qui se déroule lentement, sobrement, tout au long des pages.

C'est une étude approfondie et subtile de la psyché du protagoniste, Stevens. C'est un livre contemplatif qui nous plonge dans les méandres des réflexions du majordome, parfois pompeuses, parfois involontairement drôles, parfois profondément tragiques. Ce qui est fascinant, c'est que Stevens est un modèle de narrateur non fiable. Il dit sa vérité, mais le lecteur comprend entre les lignes et par la réaction des personnages que la réalité est tout autre. Pour moi ce roman est avant tout la question d'un choix : que faire, face à la réalisation, vertigineuse, que ce que nous croyons, que ce pour quoi nous avons consacré (sacrifié) notre vie, n'était pas juste ? Que notre système de pensée était erroné ? Préferer le déni et persister dans cette voie ou affronter cette réalité blessante, alors qu'aucun retour en arrière n'est possible ? L'auteur parvient, au travers de scènes apparement anodines, à mêler dans une écriture très soutenue mais très belle, des interrogations politiques, sur les implications de l'obéissance, la loyauté, la dignité et des questionnements intimes sur l'amour, le travail, le sacrifice...

Bien que je regrette la froideur de ce livre, liée au narrateur, qui ne permet pas de ressentir beaucoup d'émotions pendant la lecture, je trouve que c'est magistralement exécuté. C'est un livre qui m'a fait forte impression et qui restera longtemps dans mon esprit.

Un très beau livre, extrêmement bien écrit, avec de belles description. On rentre facilement dans l'univers, au point d'avoir presque envie de devenir majordome dans l'entre-deux-guerres. L'histoire mondiale se mêle avec finesse à l'histoire personnelle du narrateur.

Je suis plutôt partagée sur cet ouvrage...

Le style d'écriture et le vocabulaire m'ont enchantée et s'adaptaient particulièrement bien au narrateur.

C'est ce dernier qui a rendu ma lecture parfois un peu laborieuse et troublante...

Ce personnage semble dénué d'émotion et totalement incapable d'en comprendre même le sens. C'est à la fois agaçant, déconcertant et intéressant. Agaçant parce qu'on imagine aisément que sa vie (ou même la vie des gens autour de lui) aurait pu être très différente s'il avait été capable de percevoir les émotions de ceux avec qui il était en interaction, y compris son dernier employeur. Déconcertant parce qu'il est assez impensable (pour moi en tout cas) qu'il ait été incapable de ressentir quoi que ce soit au sujet de certains événements, ou plus précisément, d'être capable de refouler ses émotions au point de faire croire qu'il ne ressentait rien. Enfin, intéressant de voir comme certains aspects d'une vie peuvent en affecter d'autres de façon très importante, et cela par choix plus ou moins conscient. Ici, c'est l'aspect professionnel (et la dignité indispensable dans son métier) qui occulte tout le reste à tel point que notre narrateur n'est même pas conscient des blessures qu'il peut infliger à son entourage (ou à lui même), ni de l'impact qu'il peut avoir sur leur vie (notamment sur celle de Miss Kenton), ni du fait qu'il se ment à lui même au sujet de son précédent employeur. Cet aspect est assez fascinant tout en étant exaspérant.

Je n'ai pas l'habitude de lire ce genre de livre et c'est vrai qu'au début, j'étais plutôt perplexe. J'avais peur de m'ennuyer en le lisant, mais j'ai finalement eu une très bonne surprise ! C'était très intéressant de découvrir le quotidien d'un majordome anglais au 20ème siècle et l'auteur propose des réflexions intéressantes notamment autour de ce qu'est la dignité.

Roman découvert grâce à sa très agréable adaptation par James Ivory.

Stevens est un vieux majordome qui s'octroie quelques jours de congé pour retrouver Miss Kenton, l'une des gouvernantes avec lesquelles il a partagé quelques années de service à Darlington Hall. Chemin faisant, il nous raconte sa vie au manoir, une vie entièrement organisée autour des maîtres qu'il a pu servir. Quitte à approuver leurs décisions et à abandonner ses propres convictions dans un entre-deux guerres brûlant.

Je ne regrette pas d'avoir fait le détour. C'était une lecture plutôt sympathique malgré un narrateur aussi crispé que crispant - mais connaissant déjà son histoire, j'y étais préparé. Malgré sa froideur et son dévouement aveugle pour sa vie professionnelle au mépris de toutes autres choses (ce que je ne pourrai sans doute jamais comprendre, précisément pour éviter de suivre la même voie que lui), j'ai fini par éprouver une forme de compassion envers lui.

Un concentré de mélancolie qui se laisse lire tranquillement.

Kazuo Ishiguro a quelque chose de plus que les autres n’ont pas : la lenteur, des sujets de romans souvent inexplorés et surtout une belle plume. On suit, ici, un majordome. C’est sciemment qu’il se met au service des autres en ayant choisi ce métier. Son nouveau patron, un américain, lui laisse sa voiture le temps de son absence. Il va sillonner l’Angleterre en se remémorant les points forts de sa vie et celles de l’ancien propriétaire, un lord anglais, qu’il a servi une trentaine d’années.

Un beau livre, avec un personnage principal assez crispant par moments avec une personnalité complexe et assez énigmatique.