L'Archipel du Rêve

Pas familier du recueil de nouvelles, Christopher Priest s'est tout de même essayé à l'exercice, avec brio au travers de L'archipel du rêve.

Grâce à ce livre, l'auteur entretient les liens avec d'autres de ses oeuvres. L'archipel du rêve est constitué d'îles regorgeant de surprises et d'histoires. L'occasion pour l'auteur de livrer 8 nouvelles mêlant les genres. Une oeuvre aussi poétique qu'érotique, aussi belle qu'effrayante. Dans un contexte de guerre opposant Jethra et l'Archipel en question, on y découvre divers personnages et on se sent familier des lieux autant que l'on voudrait les visiter. On découvre des cultures autant que des gens, des histoires de coeur ou d'art, des peines et du bonheur. Il est difficile de rentrer plus dans en détails dans ces petites histoires sans trop en dévoiler mais les fans de l'auteur y retrouveront le style qui leur plait tant. Il convient donc de leur conseiller ce recueil, véritable oeuvre dont les qualités sont aussi nombreuses que les îles de l'archipel du rêve !

Premières nouvelles de Christopher Priest dans l'Archipel du rêve, cette lecture permet d'avoir une vision plus globale que les romans s'y déroulant, car on voit différentes îles, différents personnages, et différentes ambiances. C'est presque un voyage, très étrange, qui est proposé.

J'ai particulièrement apprécié La Négation, nouvelle qui précède La Fontaine pétrifiante, et qui parle d'un roman, intitulé L'Affirmation, qui est le titre anglais de La Fontaine pétrifiante ; La Cavité miraculeuse, dont la narration très maligne roule tout le monde, l'air de rien (et nous met face à nos a priori et nos réflexes de lecteur, c'est bénéfique et très réussi) ; La Crémation, qui présente des coutumes étranges et permet là aussi de s'interroger sur nos propres notions de "bien faire" et de politesse (et se termine brutalement, sans réponse définitive) ; La Libération, qui parle comme souvent de l'art comme partie importante de l'identité, et de son interprétation très personnelle. Les autres sont également très réussies.

J'apprécie bien sûr le style de Christopher Priest, et les thèmes abordés, et sa façon de conclure ses nouvelles sans donner de réponse, en laissant des éléments à la libre interprétation du lecteur. Il aime faire travailler le lecteur, et laisse chacun libre de son avis sur le sujet. C'est très ouvert et la lecture est plus que jamais une expérience personnelle.

Je m'attendais réellement à mieux mais j'ai été quand même étonnée par les différentes histoires //

Deuxième jalon posé par l'auteur dans le cycle informel de L'Archipel du Rêve, il s'agit ici d'un recueil de nouvelles se passant dans (ou pas loin) de ce désormais fameux Archipel. La guerre gronde depuis des années entre 2 puissances, mais l'Archipel est censé rester une zone neutre.

La plupart des nouvelles sont donc marquées par ce cadre géopolitique ("La Négation, "Les Putains", "La Libération") mais d'autres s'en affranchissent et ce sont pour moi les meilleures de ce recueil.

"La Crémation" est peut-être la plus classique mais avec un chute très efficace. "La Cavité Miraculeuse" a toutes les chances de vous laisser sans voix en son milieu (et de vous donner envie de relire les premières pages...). "Le Regard" peut-être un peu frustrante sur la fin, mais l'atmosphère moite de voyeurisme en fait le point d'orgue du recueil.

C'est donc une véritable plongée dans la vie de l'Archipel que nous propose cette fois Priest, par petites touches. Et l'auteur nous donne une furieuse d'envie de nous y prolonger plus longuement! Ça tombe bien, puisqu'il a ensuite écrit "Les Insulaires"!

A noter comme très souvent dans la collection Lunes d'Encre de Denoël, la magnifique couverture de Manchu!

Un recueil où le talent et l'écriture subtile de C. Priest peuvent s'exprimer avec éclat. Toutes les nouvelles, leur thème, leurs personnages; s'assemblent, pour former un ensemble cohérent d'une rare qualité et d'une force peu commune. Des idées, des climats, des décors, de beaux textes baignant le bienheureux lecteur dans une ambiance insulaire et dans la moiteur des tropiques. Lecteur qui aura un peu de mal a s'en remettre et à revenir vaille que vaille à la réalité.

Pfou! Quel bouquin....