Les Malloren, Tome 3 : Sous le masque de lady Malloren

Londres, juin 1762

— Tu vas me manquer, se lamenta lady Elfled Malloren, qui se jeta dans les bras de son frère jumeau, résolue à retenir ses larmes.

— C’est un changement de taille, reconnut celui-ci d’une voix grave. Voilà qui va de nouveau perturber nos habitudes après cette année passée ensemble.

Le capitaine lord Cynric Malloren s’apprêtait à partir en voyage officiel. Dans toute sa gloire militaire, il était habillé d’une tunique rouge, les cheveux poudrés et soigneusement noués par un ruban noir.

Elf, quant à elle, était vêtue d’une robe blanche parsemée de myosotis brodés. Sous une légère coiffe en dentelle, ses cheveux luisaient de leur blond vénitien naturel.

Malgré leurs atours si différents, leur ressemblance était indéniable.

— J’aimerais que tu ne t’en ailles pas si loin. La Nouvelle-Écosse… Il va se passer des années avant que…

Cyn posa ses doigts sur les lèvres tremblantes de sa sœur.

— Chut. J’ai déjà été absent plusieurs années, et tu vas bientôt retrouver le tourbillon de la vie.

Elf grimaça et se dégagea des bras de son frère.

— Ne commence pas à prêcher les avantages de la vie maritale !

Il jeta un coup d’œil souriant à sa femme, qui attendait avec tact près de la porte d’entrée et discutait avec leur frère, le marquis de Rothgar.

— Le mariage me va bien, et toi et moi nous ressemblons énormément.

« Vraiment ? » eut envie de demander Elf, mais ce n’était pas le moment de poser des questions troublantes.

— Dans ce cas, je vais reconsidérer les candidats, dit-elle d’un ton léger, avec une moue taquine. Bien sûr, cela m’aiderait si mes dévoués frères n’effrayaient pas tous les plus intéressants !

Cyn lui fit un clin d’œil.

— Il faut être scélérat soi-même pour reconnaître les autres. Nous ferions mieux d’y aller.

Toutefois, il n’en fit rien, quand bien même un carrosse et six chevaux agités attendaient à l’extérieur.

— Allez. Je déteste les longs adieux.